lundi 13 juin 2011

En souvenir amical de Hoda Saber, mon camarade de cellule à Evine – Saïd Pourheydar

Le 12 juin 2011 - 20:30 heure de Téhéran

Les larmes continuent de rouler sur mes joues. Je ne sais pas quoi écrire. Hoda nous a quittés lui aussi ; un homme que j’aimais, que j’adorais ; un amour et une admiration jamais ressenties avant de le rencontrer. Hoda et moi partagions la cellule 3 du bloc 350 d’Evine. Hoda était un modèle de dignité et d’humanité.
Saïd Matinpour, Hoda et moi avions l’habitude de cuisiner pour nos camarades de cellule. Chaque soir, nous arpentions le couloir et bavardions pendant une demi-heure. Nous parlions du Mouvement Vert et de son futur, nous parlions de l’alliance nationale religieuse* [le groupe politique Melli-Mashabi], nous parlions de l’histoire de la résistance en Iran et d’Ezzatollah Sahabi**.

 Je savais que Hoda ne supporterait pas le départ d’Ezzatollah et Haleh. La nouvelle de sa grève de la faim ainsi que celle d’Amir Khosrow  [Dalirsani] m’a beaucoup inquiété. Je connaissais sa condition physique, l’indifférence des autorités de la prison ainsi que des responsables du dispensaire, ce qui n’a fait qu’augmenter mes inquiétudes. Je comprenais totalement sa situation précaire.

Je me souviens qu’une fois, sa tension avait tellement chuté qu’il s’était évanoui et nous l’avions porté au dispensaire. Une demi-heure plus tard, au lieu de le transporter à l’hôpital, ils l’ont ramené en cellule dans le même mauvais état physique. Ils lui avaient donné de l’eau sucrée et lui avaient fait une intraveineuse et le considéraient donc comme guéri. Il était un petit peu pâle mais il était comme toujours solide et inébranlable. J’avais l’habitude d'échanger mes clémentines contre ses pommes. Il disait toujours que les clémentines sucrées étaient bonnes pour lui.

Quand j’ai appris le décès d’Ezzatollah Sahabi, j’ai demandé à Dieu de faire en sorte d’épargner la nouvelle à Hoda. J’ai même souhaité qu’on le transfère à l’isolement ce jour-là, parce que je savais qu’il ne le supporterait pas. Bien que Hoda n’ait pas été assez solide pour supporter une grève de la faim, je savais qu’il en commencerait une pour protester contre la mort de Haleh. Je savais qu’il la poursuivrait jusqu’au bout…. Et c’est ce qu’il a fait…

Je suis incapable d’écrire… Je suis submergé de larmes – Mon corps est envahi d’un sentiment total de tristesse et de colère… 

Notes de la traduction:
* L’Alliance Nationale Religieuse est formée d’un groupe de militants qui prônent la réforme politique et demandent la mise en place de la constitution pour maintenir un état de droit. Ce groupe, qui n’a pas de structure formelle, s’est rassemblé pour contester les élections parlementaires de 2000.

** Feu Ezzatollah Sahabi, erudite iranien, humaniste, militant démocrate, politician, ancient parlementaire et dirigeant de l’Alliance Nationale Religieuse, est décédé le 31 mai 2011. Sa fille, Haleh Sahabi, humaniste et militante démocrate, est décédée d’un arrêt cardiaque le 1er juin 2011 lors des funérailles de son père après l’attaque de voyous en civil tentant d’empêcher la procession funèbre.

 Le 12 juin 2011 - 21:30 heure de Téhéran

Mon cher Hoda, as-tu souffert ? As-tu gémi jusqu’à l’aube à cause d’une douleur dans la poitrine sans personne qui vienne à ton secours ? Hoda, te souviens-tu quand j’ai eu mal dans la poitrine et que tu m’as mis un comprimé sous la langue au milieu de la nuit ? Où étais-je Hoda pour soigner ton cœur douloureux ? Je voudrais que tu te soies souvenu que les comprimés étaient encore sous le lit, là où tu me les avais laissés la dernière fois que tu m’en avais donnés… DIEU, m’entends-tu ????????!!!!!!!!!!!


Source: Saeed Pourheydar's Facebook http://www.facebook.com/saeed.pourheydar?sk=wall

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