mardi 29 juin 2010

Rooz/La pression sur la famille Ossanlou continue

Seulement une semaine après l’attaque brutale et l’arrestation de la bru de Mansour Ossanlou, le plus jeune des fils de ce célèbre syndicaliste a été convoqué à la 1027ème chambre du tribunal révolutionnaire aujourd’hui.


Dans une interview avec Rooz, Parvaneh Ossanlou, l’épouse de Mansour Ossanlou a commenté cet évènement : « Mon fils a été arrêté le 23 juin 2009 puis relâché après 18 jours de prison. Son dossier a été clos à ce moment je n’ai donc aucune idée de la raison pour laquelle il a de nouveau été convoqué. »


« Contrairement aux autres jours, le 23 juin de l’année dernière, les rues étaient plutôt calmes. Mon fils était sorti acheter une paire de chaussures quand il a été arrêté avec d’autres personnes. Il a été relâché 18 jours plus tard et a supporté beaucoup de souffrances physiques et psychologiques. A l’époque, j’ai accompagné mon fils au tribunal et j’ai apporté son dossier médical. Je les ai informé que mon fils était sous traitement car il venait de subir une grave opération du crâne. J’ai expliqué qu’il ne pouvait pas quitter la maison et qu’il n’avait donc eu de contacts avec personne. Ils m’ont posé beaucoup de questions et ont clos le dossier. »


« Hier, ils ont rappelé pour convoquer mon fils à la 1027ème chambre pour le même dossier. Je ne sais absolument pas pourquoi. Voilà quatre ans que Monsieur Ossanlou est en prison et ils continuent de mettre une telle pression sur sa famille. L’incident de ma bru a eu lieu cette semaine et maintenant un nouveau prétexte, tout cela pour mettre la pression sur Monsieur Ossanlou. Quand j’ai parlé à mon mari au téléphone hier, je n’ai pas mentionné ce qui arrive à notre fils. J’attends d’en savoir plus aujourd’hui pour lui en parler. »


A propos de sa bru, Madame Ossanlou a dit : « Psychologiquement, elle est actuellement très faible. Elle est très énervée et ne peut pas bouger le bras droit. Zoya est sous traitement médical. En ce moment, nous passons le plus clair de notre temps en visite chez les médecins. »


Madame Ossanlou, qui avait auparavant indiqué qu’elle porterait plainte pour ce qui est arrivé à sa bru, Madame Samadi, a confirmé aujourd’hui avoir contacté la justice pour lui demander d’enquêter sur le sujet immédiatement.









dimanche 27 juin 2010

Rooz/Fereshteh Ghazi: Parvaneh Ossanlou - "Ma bru a fait une fausse-couche!"

Rooz : Madame Ossanlou, ces derniers jours, on a rapporté l’arrestation et le passage à tabac sévère de Zoya Samadi, votre bru. Allez-vous poursuivre en justice pour ce qui s’est passé ?



Parvaneh – Oui, absolument. Malheureusement, cela s’est passé alors que tout était fermé pour trois jours. Nous allons poursuivre en justice dimanche pour voir si, pour la première fois ils [la justice] vont examiner de tels sujets.



Rooz – Pourquoi pensez-vous qu’ils aient traité de cette façon un membre de votre famille ?



Parvaneh – Leur seul but est de terroriser et d’intimider notre famille. Ils veulent mettre la pression sur Monsieur Ossanlou.



Rooz – Mais Monsieur Ossanlou est déjà en prison pourquoi voudraient-ils augmenter la pression sur lui ?



Parvaneh – Il n’y a que ces messieurs qui puissent répondre à cette question. Il faut qu’ils expliquent pourquoi ils ont autant peur de Mansour alors qu’il est en prison depuis quatre ans. Il faut qu’ils expliquent pourquoi ils traitent ainsi les membres de la famille d’un militant syndicaliste qui paie déjà le prix pour son militantisme.



Rooz- Votre bru milite-t-elle politiquement ou syndicalement ?



Parvaneh – Non, elle est ingénieur et n’a jamais été active politiquement. Cet incident était destiné à mettre la pression sur Monsieur Ossanlou. Ils ont arrêté ma bru qui est innocente, et l’ont mis dans un état de détresse physique et psychologique uniquement pour terroriser Monsieur Ossanlou et notre famille.



Rooz – Savez-vous qui est responsable de cet incident ?



Parvaneh – Ils ont bandé les yeux de Zoya pour qu’elle n’ait aucune idée de l’endroit où on l’emmenait et qui était présent.



Rooz – Qu’ont-ils exigé spécifiquement de Zoya Samadi ?



Parvaneh – Ils lui ont demandé de signer une lettre garantissant que Monsieur Ossalou cesserait toutes ses activités et quitterait le pays une fois libéré de prison.



Rooz – Monsieur Ossalou est-il au courant de cet incident ? Si oui, qu’en pense-t-il ?



Parvaneh – D’abord, nous avions décidé de ne rien lui dire. Nous ne voulions pas qu’il s’inquiète. Malheureusement, il en a entendu parler et nous avons donc du lui donner tous les détails. Il a, bien sûr, été extrêmement perturbé par la nouvelle et a dit que nous devions poursuivre en justice. Nous nous occupons bien sûr à 100% de cette poursuite.



Rooz – Cet incident est-il une première ou votre famille est-elle habituée à de telles menaces ?



Parvaneh – Il y a environ un an qu’ils ont commencé à menacer ma bru de façon répétée. Ils se sont même rendus à son bureau plusieurs fois et l’ont menacée dans la rue en lui posant un pistolet sur la taille. Ils l’ont également convoquée une fois à la 14ème chambre du tribunal révolutionnaire. Quand je me suis rendue à la chambre, on m’a dit qu’elle n’avait jamais été convoquée. En vérité, nous n’aurions jamais imaginé qu’une chose pareille se produirait. Elle a toujours obéi à la loi. Ma bru est innocente. Elle n’a vu Monsieur Ossanlou qu’une seule fois, le soir de ses fiançailles avec notre fils. Elle n’a jamais rendu visite à Monsieur Ossanlou depuis son incarcération. Elle n’a aucun lien d’aucune sorte avec les activités de mon mari. La vérité est que cet incident nous a tous laissé vraiment sans voix. Nous n’aurions jamais imaginé une telle chose.



Rooz – Avez-vous fait quelque chose de spécial cette année contre les menaces que vous avez mentionnées ?



Parvaneh - Oui, nous nous sommes rapprochés du responsable de la justice à plusieurs occasions. Nous avons également écrit au procureur de Téhéran et au bureau des droits civiques de la justice pour décrire ces incidents en détail. Nous n’avons jamais été contactés. Ils n’ont jamais rien fait pour répondre à nos plaintes. Et maintenant, il y a eu ce dernier incident.



Rooz – Dans quel état physique et psychologique se trouve actuellement Madame Samadi ?



Parvaneh – Malheureusement elle est en grande détresse. Elle est encore en état de choc et psychologiquement fragile. En plus des saignements de nez, des dommages aux gencives et aux dents, ma bru était aussi enceinte de deux mois. Nous n’étions bien sûr pas informés de sa grossesse et n'avons découvert qu’après qu’elle ait été examinée pour une grosse hémorragie, qu’elle avait fait une fausse-couche.



Rooz – Récemment, il y a eu des rumeurs sur une possible libération de Monsieur Ossanlou.



Parvaneh - Mansour a déjà purgé quatre des cinq années de prison de sa peine. Nous aussi, nous avons entendu ces rumeurs, cependant, ils ne nous ont donné aucun signe indiquant qu’ils aient l’intention de lui accorder une libération anticipée.



Rooz – Pouvez-vous nous parler de l’état de Monsieur Ossanlou



Parvaneh - Mansour est actuellement dans la section 3 du bloc 8 de la prison de Radjaï-Shahr. Malheureusement, il aurait besoin de consulter un ophtalmologiste. Il a également des problèmes cardiaques et devrait passer une angiographie, mais vous pensez bien qu’il n’a accès ni à l’une, ni à l’autre.



Rooz – Comment comptez-vous traiter l’incident que vous venez de relater ?



Parvaneh – En fait, nous ne pouvons pas faire grand-chose. Nous ne pouvons que contacter la justice et attendre qu’ils s’occupent du problème. Nous ne nous sentons absolument pas en sécurité. Il est très hautement probable qu’un incident similaire arrive à un autre membre de la famille. Ce récent incident impliquant ma bru nous a fait à tous l’effet d’une douche froide. Je demande à toutes les organisations internationales s’occupant de droits de l’homme de prendre les mesures nécessaires pour éviter que ce genre d’incident se reproduise où que ce soit dans le monde. Je voudrais répéter que si nos vies sont menacées ou s’il arrive quoi que ce soit à qui que ce soit de ma famille, j’en tiendrai la justice et le gouvernement de la république islamique pour directement responsable. »



Source: Rooz http://www.roozonline.com/persian/news/newsitem/article////107/-6125ebe3ad.html







L’état physique terrible d’Issa Saharkhiz à la prison de Radjaï Shahr

Samedi 26 juin 2010. Suivant Kalame, Issa Saharkhiz est dans un état physique terrible à la prison de Radjaï Shahr. Les autorités de la prison ont refusé de le transférer à l’infirmerie et, en dépit de la détérioration de son état, ils ne lui ont fourni que quelques médicaments de base, inappropriés pour son traitement.

Issa Saharkhiz, journaliste emprisonné depuis un an sans procès, souffre d’hypotension artérielle et s’est évanoui pour la deuxième fois ; il a été transféré en soins intensifs à l’hôpital.

Son fils, Mehdi Saharkhiz , a déclaré qu’il ne bénéficiait pas d’un traitement approprié en prison et que l’historique médical de son père à savoir une hypotension artérielle sévère requérait un traitement spécifique et le suivi d’un spécialiste. Mehdi Saharkhiz a ajouté que, bien que le moins que l’on puisse dire des conditions médicales de Radjaï Shahr est qu’elles sont inférieures à la norme, on a malheureusement refusé à son père une permission pour raison médicale pour lui permettre d’être traité.

Mehdi Saharkhiz a souligné que même avant le transfert de son père à Radjaï Shahr, il était très difficile de lui rendre visite. Il a ajouté que ce n’était pas particulier à sa famille et que beaucoup d’autres familles de prisonniers politiques comme celles de Zeydabadi et Bastani étaient contraintes à de longues heures de voyage pour rendre visite à leurs proches emprisonnés ; avec l’application d’un nouveau règlement, les épouses de prisonniers politiques ne pouvant rendre visite à leurs époux qu’une semaine sur deux, il est encore plus difficile pour les familles de voir leurs proches lors de grandes occasions comme la fête des pères.

Mehdi Saharkhiz répète que les prisonniers de Radjaï Shahr sont privés de soins médicaux et ajoute que même si l’état de santé de son père s’est détérioré, les autorités de la prison refusent de le transférer à l’infirmerie et se contentent de lui fournir des médicaments de base.

Source: http://www.kaleme.com/1389/04/05/klm-24092

Rooz/Epouse d’Abdollah Momeni : Le régime répète l’injustice que Saddam m’a infligée

25 juin 2010 - Par Kayvan Bozorgmehr

Le prisonnier politique Abdullah Momeni est un membre important et porte-parole du groupe Advar Tahkim, la plus grande organisation estudiantine réformiste. Dans une interview exclusive avec Rooz, son épouse Fatemeh Adinehvand dit que le régime iranien est en train de répéter l’injustice que Saddam Hussein lui avait infligée en tuant son mari.



Abdullah Momeni a épousé la femme de son frère après que ce dernier ait été déclaré mort au combat en 1985 durant la guerre de huit ans Iran-Irak. Après plusieurs années de militantisme dans le mouvement étudiant en Iran, Momeni est de nouveau en prison, une expérience difficile pour lui. Son épousé a parlé à Rooz du calvaire de son mari. Evoquant les traces de torture qu’elle a vu sur le visage de son mari, Fatemeh Adinehvand dit : « Je ne pouvais pas croire ce qu’ils lui avaient fait… J’ai pensé que le régime répétait l’injustice que Saddam Hussein m’avait infligée. »



En voici des extraits :



Rooz: Quel est votre pire souvenir de l’année passée depuis que Monsieur Momeni est en prison?



Fatemeh Adinehvand (Adinehvand): C’est quand j’ai vu Abdullah pour la première fois après son arrestation dans la cour de la prison d’Evine et aussi quand ils ont diffusé ses aveux à la télévision, ça a été très difficile Je ne sais pas comment j’ai survécu à ce calvaire. Quand ils ont diffusé ses aveux à la télévision nationale, j’ai seulement dit : « Venez voir votre père » je n’ai pas réagi devant les enfants mais cela les a beaucoup attristés



Rooz: Vous décrivez le moment où vous avez vu Monsieur. Momeni pour la première fois après son incarcération, c’est très touchant. Comment se sont passés ces moments et que ressentiez-vous ?



Adinehvand: J’ai supporté beaucoup de souffrances dans ma vie mais ce moment précis a peut-être été le plus douloureux. Quand Abdullah est sorti de la voiture, son visage était pâle et gonflé ; il n’avait plus que la peau sur les os. Il n’a même pas pu sorti de la voiture tout seul. Je n’aurais pas emmené les enfants avec moi si j’avais su qu’Abdullah était dans cet état. Je n’arrivais pas à croire ce qu’ils en avaient fait. C’était comme si ma vie entière défilait devant mes yeux. J’ai pensé que le régime iranien était en train de répéter la souffrance que Saddam Hussein m’avait infligée et qu’il était en train de ruiner ma vie pour une seconde fois. Abdullah pleurait. La seule chose qu’il ait dite, c’est qu’il ne voulait parler de son état qu’après être sorti de prison. Nous n’avons pas pu parler convenablement. Abdullah ne le pouvait pas et ce n’était pas le bon moment. Nous étions également enregistrés.



Rooz: Comment gérez-vous son absence en ce moment ?



Adinehvand: La première fois qu’il a été arrêté je n’arrivais pas à venir à bout du fait qu’Abdullah soit en prison pour militantisme politique. En 2005, Abdullah a fait 45 jours de prison et c’était très difficile pour moi. En 2007, il a été arrêté 35 jours, je me suis persuadée que je devais venir à bout du problème. Traiter les problèmes logiquement vaut mieux que de les laisser vous dévorer de l’intérieur.



Source : http://www.roozonline.com/english/news/newsitem/article/2010/june/25//regime-repeating-saddams-injustice-against-me.html



L’état de santé de Madjid Tavakoli se détériore sérieusement

 Dimanche 27 juin 2010 – Suivant les rapports de HRANA, en dépit de son état de santé qui se détériore sérieusement, les autorités de la prison n’ont toujours rien fait pour qu’il soit traité. Tavakoli est un militant étudiant célèbre, transféré dans la salle 2 du bloc 350 d’Evine le 22 juin 2010.

HRANA rapporte qu’en raison des conditions difficiles de la prison et en particulier de sa grève de la faim sèche pendant qu’il était au secret au bloc 240, il souffre maintenant de sérieux problèmes pulmonaires qui empirent de jour en jour.

Les médicaments prescrits à Tavakoli par un médecin ne suffisent plus. Le Docteur Behzadian-Nedjad, compagnon de cellule de Tavakoli, lui a recommandé de les arrêter à cause de possibles effets contraires.

Madjid Tavakoli est actuellement détenu dans la salle 2 du bloc 350 d’Evine (auparavant salle 5). Depuis son transfert, il n’a eu droit qu’à une seule conversation téléphonique de 2 minutes avec sa famille.

En raison des travaux en cours, beaucoup de prisonniers politiques ont été transférés d’autres sections au bloc 350 (surtout des sections 7 et 8) qui souffre de plus de restrictions que les autres blocs communs de la prison.

Il faut mentionner que Madjid Tavakoli, ancien étudiant de l’université Amir-Kabir de Téhéran, a été condamné à 8,5 ans de prison et est incarcéré depuis le 7 décembre 2009.

Source: http://www.daneshjoonews.com/news/student/1705-1389-04-06-08-57-41.html



samedi 26 juin 2010

Lettre pour la fête des pères de Shiva Nazar Ahari : « Papa, reste fort »

C’est la deuxième fête des pères consécutive que la militante des droits humains Shiva Nazar Ahari passe loin de chez elle. L’année dernière, alors qu’elle était derrière les barreaux du quartier 209 de la prison d’Evine, elle avait utilisé le stylo et le papier laissé dans sa cellule par son interrogateur pour écrire à son père. Lorsqu’elle fut libérée pour quelques mois, elle lui donna la lettre.

Le comité des droits humains publie cette lettre le jour de la fête des pères de cette année alors que Shiva est toujours en prison. Le 20 juin 2010 Shiva Nazar Ahari a été transférée du quartier 209 au quartier commun de la prison d’Evine.

Papa, reste fort

Par SHIVA NAZAR AHARI

Je n’étais pas présente le jour de la fête des mères pour embrasser les mains de maman et maintenant je ne suis pas présente pour toi le jour de la fête des pères. Cher Papa, tu n’as qu’un jour qui te soit consacré parmi les 365 d’une année. Que tes larmes coulent à travers les crevasses de ma solitude. Que tes larmes me noient parmi tous les crimes que je n’ai pas commis.

Papa, continue à pleurer. Tu as le droit de déverser ta douleur. Voilà des mois que je n’ai pas dormi dans la chambre contiguë à la tienne. Tu n’as pas de nouvelles de ta fille. C’est ta journée et une fois de plus je ne suis pas là. Papa, en dépit de toute la résistance que je déploie, tes mains manquent encore aux miennes. Papa, mes épaules meurent d’envie de sentir les tiennes. Même si je suis devenue adulte, même si je fais mes devoirs dans une prison appelée Evine, et même si j’ai acquis beaucoup de force, je sens encore qu’il me manque une partie de moi-même quand tu n’es pas là.

Cher papa, à chaque fois que je traverse une rue, mes mains cherchent les tiennes pour me sauver de la circulation. Chaque matin, je pleure, les mains contre les murs et je m’appuie sur le seul pouvoir de ma volonté.

Tu m’as appris à ne pas céder Tes mots, les histoires que tu me racontais au moment de me coucher ont donné un sens au mot résistance. Tu disais que l’injustice passerait et que la légende des gens de bien resterait.

Je ne veux pas être là où je suis. Tu m’as appris à y être. Je régurgite tes mots quotidiennement. Je ne veux pas permettre à toute cette solitude et à tout ce silence de me briser.

Papa, continue à pleurer mais ne pleure pas pour moi. Pleure pour une patrie qui envoie les meilleurs de ses enfants en prison. Mais reste fort papa. Mes épaules ont besoin de la force des tiennes. Il ne faut pas que ton dos se courbe sous la pression ou je n’aurais plus rien pour m’appuyer. Reste fort papa.

Source: http://persian2english.com/?p=12196



Parvaneh Ossanlou: La famille de Mansour Ossanlou est sans défense

RAHANA-Mercredi 23 juin 2010 à environ 17h30, Zoya Samadi, la bru de Mansour Ossanlou (Responsable du syndicat des travailleurs de la compagnie des bus de Téhéran et banlieue) quittait son travail pour rentrer chez elle. Zoya Samadi a été brutalement accostée par des agents du ministère du renseignement à la station de métro Tarasht alors qu’elle descendait d’une rame pour permettre à d’autres voyageurs de la quitter.



Les agents du ministère du renseignement en civil, à la vue de tous, ont arraché le foulard de Madame Samadi et ont commencé à la battre et à la tirer par les cheveux.



Après son arrestation, Zoya Samadi a été emmenée dans un endroit inconnu durant quatre heures. Sous la torture, les agents lui ont dit : « Il vous faut garantir que si Ossanlou est libéré de prison, il ne restera pas en Iran et qu’il cessera toute activité. »Il est nécessaire de mentionner que ces derniers jours, il a été fait allusion à une grâce possible pour Mansour Ossanlou et sa libération de prison imminente. Nous avons parlé à Parvaneh Ossanlou, son épouse, de l’éventualité de la libération de son mari et de la récente arrestation de sa bru.



« Mercredi après-midi alors que Zoya revenait du travail, elle a été attaquée par des agents du ministère du renseignement à la station de métro Tarasht. Ils ont commencé à la frapper dès son arrestation. Elle a été menottée, les yeux bandés et a été emmenée dans un endroit indéterminé.»«Lors de son arrestation, Zoya Samadi tenta de crier pour demander de l’aide, mais en vain car les agents ont agi très rapidement et n’ont permis à personne d’intervenir. Puis ils l’ont transférée dans un endroit qu’elle ne peut pas identifier à cause de ses yeux bandés..» «La brutalité des coups portés à Madame Samadi ont laissé des traces bien visible sur son corps. Elle est actuellement en état de choc : saignements de nez, nausées et mal de dos ne sont que quelques unes des complications dont elle souffre, suite à ce brutal passage à tabac..»«Je ne sais absolument pas pourquoi ils ont fait une chose pareille. Ma bru n’a rien fait de mal et le fait que Monsieur Ossanlou soit en prison n’a aucun rapport avec elle. Mon mari n’a vu Zoya qu’une fois, le soir de ses fiançailles avec notre fils. Je me sens honteuse et humiliée devant ma bru et sa famille. Qu’a-t-elle fait pour mériter un tel traitement ? Ils l’ont arrêtée et battue constamment pendant trois à quatre heures. Puis ils l’ont laissée, blessée sous le pont de Seyyed Khandan. »






Quand elle a appris cet incident, la famille Ossanlou s’est précipitée à l’aide de Zoya Samadi et l’a emmenée à l’hôpital où elle a été traitée toute la nuit. Les agents du renseignement l’avaient avertie : « Vous ne devez pas informer qui que ce soit de cet incident ni déposer quelque plainte que ce soit. »



« Qu’est ce que c’est que cette conduite ? Pourquoi ne demandent-ils pas à Monsieur Ossanlou lui-même des garanties qu’il quittera le pays et cessera toutes ses activités ? Comment sa bru pourrait-elle donner des garanties pour lui ? Monsieur Ossanlou sait parfaitement ce qu’il doit faire et ne pas faire. Ils pensent qu’en mettant la pression sur mon mari, ils pourront le changer en quelqu’un d’autre. Il a déjà supporté des épreuves extrêmes dans les pires circonstances. Pourquoi ne laissent-ils pas sa famille tranquille ?» 
« Ils ont retiré le foulard d’une femme innocente qui leur est étrangère [référence à la loi islamique qui veut qu’une femme se couvre les cheveux devant des hommes qui ne sont pas de sa famille] et le lui ont mis autour du cou pour l’étouffer. Ils l’ont menacée, si elle parlait, de la tuer et bien plus. C’est cela l’islam ? C’est cela la loi ? Notre pays n’a-t-il pas de lois ? Qui sont ces individus ? D’où viennent-ils ? Comment osent-ils commettre de tels crimes en plein jour ? »



If faut rappeler qu’il y a quelques jours, l’organisation internationale du travail (OIT) mentionnait dans son rapport annuel sur la justice iranienne que la république islamique avait accepté d’accorder une grâce à Mansour Ossanlou, le responsable emprisonné du syndicat des travailleurs de la compagnie de bus de Téhéran et sa banlieue.



Cette nouvelle de l’OIT a conduit au kidnapping et à la torture de la bru d’Ossanlou. « Nous avions entendu parler de cette nouvelle. Cependant ni nous ni Monsieur Ossanlou n’avons été informés directement. Jusqu’à présent, la seule chose qu’ils aient faite c’est d’informer ma bru qu’ils avaient l’intention de libérer mon mari et que s’ils le faisaient, elle devait promettre qu’il quitterait l’Iran et cesserait toutes ses activités.»



«Les activités de Monsieur Ossanlou ne regardent personne. Qu’est ce que c’est que cette liberté ? Que vaut la liberté assortie de ce genre de menaces et de conduite ? Si c’est le cas, nous ne voulons pas qu’il soit libéré. Ce n’est pas la liberté. C’est encore une autre forme d’emprisonnement. Pourquoi devrions-nous quitter notre pays de force ? Même si nous sommes privés de toute sorte de sécurité, l’Iran est encore notre pays. Nous sentons l’insécurité et la menace dans notre vie quotidienne, même quand nous quittons la maison pour aller faire les courses. »



Mansour Ossanlou en est à sa quatrième année à la section 3, quartier 8 de la prison de Radjaï Shahr. « Nous avons supporté quatre ans. Quand Monsieur Ossanlou a appris l’incident, il en a été profondément affecté. Il a été condamné à cinq ans, il n’en reste qu’un. Nous ne voulons pas de ce genre de liberté. Ce n’est pas la liberté. Si nécessaire, nous attendrons une année de plus pour qu’il soit libéré de prison. Ils ont apporté tellement de souffrances à notre famille. Nous avons tout supporté docilement sans un mot. Ce n’est pas suffisant ? Ils l’ont incarcéré. Ils l’ont licencié. Combien d’injustice peut-on infliger à une seule personne ? Dans ce pays, est-ce qu’en dehors d’eux quelqu’un d’autre a des droits ?.»«J’en appelle à toutes les organisations internationales de défense des droits humains et à quiconque s’intéresse qux innocents et à leurs droits humains de base ; qu’ils fassent tout ce qui est en leur pouvoir pour nous aider. Ici, nous sommes sans défense. Ils ont nui à notre famille et continuent de le faire..»


Mansour Ossanlou, responsable du syndicat des travailleurs de la compagnie des bus de Téhéran et de sa banlieue a été arrêté une première fois en janvier 2006, il a alors passé 8 mois en prison. Il a été arrêté de nouveau en novembre 2006 et relâché un mois plus tard sous caution. A l’été 2007, Ossanlou a assisté à une réunion annuelle de la fédération internationale des travailleurs des transports à Londres et il y a pris la parole. Il a été arrêté une troisième fois le 10 juillet 2007 à son retour en Iran. Lors de son arrestation, il a été attaqué par les agents du ministère du renseignement dans la rue et d’abord emmené à la prison d’Evine. Ossanlou a été plus tard transféré à la prison de Radjaï Shahr où il se trouve toujours.





Source: RAHANA: http://www.rhairan.in/archives/17469





jeudi 24 juin 2010

Ahmad Batébi - Tout le monde fait des erreurs, nous y compris - 2ème partie

Interview par MARYAM NY



Maryam NY: Je pense que vous serez d’accord : à l’extérieur de l’Iran il doit y avoir davantage d’unité pour soutenir le mouvement populaire. Comment être unis davantage ?


Ahmad Batebi: Nous, Iraniens, pensons que nous sommes les bons et les autres les mauvais. Par exemple, si on dit à quelqu’un de participer à une manifestation, il ou elle répond : « Non, je ne viens pas parce qu’il y aura des monarchistes. »Vous demandez : « Et alors, qui a-t-il de mal à çà ? » Il ou elle répond : « Les monarchistes ont volé l’agent du pays puis ont quitté l’Iran » Vous dîtes alors : « Allons à une autre manifestation » On vous répond : « Non parce qu’il y aura des Modjaheddines (Organisation de Modjaheddines du Peuple) » Vous demandez, « Pourquoi est-ce mal ? » On vous répond « Ils sont partis en Irak au milieu de la guerre Iran-Irak et ont trahi le peuple iranien. ». Alors vous demandez aux monarchistes, aux Modjaheddines et aux communistes de participer à une manifestation. Ils répondent qu’ils ne viendront pas parce qu’il y aura des partisans de Moussavi. Vous demandez : « Et c’est un problème ? » On vous répond : « Moussavi était premier ministre à l’époque des massacres de 1988. » Ce qui montre que nous sommes prompts à juger. « Ca c’est bien » et « Ca c’est mal » Nous pensons avoir raison et être les bons alors que les autres ont tort et sont les mauvais. Le juge qui occupe notre esprit n’est pas un bon juge, mais plutôt une sorte de Saïd Mortazavi* qui ne permet pas à l’adversaire de se défendre. On fait des erreurs. Tout le monde se trompe. Voulez-vous empêcher quelqu’un de se joindre au mouvement à jamais ? La première étape est de dire que nous sommes mauvais et les autres bons. Il faut donc tuer le juge Mortazavi qui occupe notre esprit et admettre que nous faisons des erreurs comme les autres.


Maryam: A votre avis, Moussavi devrait-il expliquer le rôle qu’il a joué dans les massacres de 1988 ?


Batébi: Non, pas maintenant. Je ne suis pas un « moussaviste ». Je crois que les gens doivent voter parce que j’ai foi en la participation active. Je dis que si tout le monde vote, alors chacun a le droit de revendiquer. Le mouvement a gagné en solidité à cause de la participation massive. Quand ils demandaient « où est mon vote ? », il n’y aurait pas eu tant d’ « actionnaires » demandant leur part s’il y avait eu boycott. Je n’ai pas voté pour Moussavi et je ne l’aimais pas beaucoup car je le pensais un peu conservateur et il veut toujours que l’Iran retourne à ses origines [1980]. Cependant, au fil du temps, j’ai compris que je me trompais beaucoup au sujet de Moussavi. Il est vrai que mon mode de pensée est différent du sien. Je suis laïc et nous ne partageons pas beaucoup de points de vue en ce domaine ; cependant, je lui porte beaucoup de respect parce qu’il s’est élevé en protestant pour les droits du peuple. Si nous voulons éliminer le Mortazavi qui squatte notre esprit et le juger de façon réaliste, alors l faut reconnaître qu’à l’époque où il était premier ministre, les trois pouvoirs, législatif, exécutif et judiciaire étaient séparés en Iran. Mettons-nous à sa place, en 1988, en plein milieu de la guerre et des conflits et alors que Khomeiny était encore en vie et doté d’un tel charisme, que fallait-il faire ? Aurait-il fallu tuer Khomeiny ? S’opposer à la justice ? L’ambiance et l’atmosphère ne permettaient pas à Moussavi de faire quoi que ce soit. Néanmoins, Moussavi devra un jour expliquer les problèmes de l’époque, qui était responsable et le rôle qu’il a joué. S’il a commis une erreur, il devra s’en excuser devant le peuple, s’il n’en a pas commise, il devra l’expliquer. Il doit le faire, mais le faire maintenant serait de l’auto flagellation. Quand le mouvement sera vainqueur, nous aurons tout le temps nécessaire pour lui demander de s’occuper du problème.


Maryam: J’ai suggéré que Moussavi reconnaisse les massacres pour davantage d’union au sein du peuple.


Batébi: Une telle reconnaissance n’est importante que pour réunir les gens hors d’Iran, pas pour ceux de l’intérieur. Pour le peuple iranien, il suffit que Moussavi ait eu le courage de s’élever contre le pouvoir. Nous qui vivons en dehors du pays ne pouvons pas décider pour le peuple iranien. Cette demande émane de la diaspora. Je crois aussi qu’il faut qu’il s’explique mais nous avons des problèmes plus importants à régler pour l’instant. Le peuple iranien veut que le mouvement continue d’exister. Il vaut mieux que Moussavi fasse montre de courage et tienne ses positions comme Karroubi. Nous aurons tout le temps plus tard pour ces discussions.


Notes des traducteurs :
* A l’été 1988, à la fin de la guerre, Khomeiny a ordonné que tous les prisonniers politiques refusant de se repentir soient exécutés. Des milliers de prisonniers politiques, dont certains avaient fini de purger leur peine mais étaient encore illégalement détenus, furent alors brutalisés et exécutés en masse après de courts interrogatoires. Ils furent enterrés dans des tombes anonymes à Khavaran à l‘est de Téhéran. Aucune information n’est disponible sur ceux qui ont ete exécutés en province.


** Saïd Mortazavi fut juge spécialisé dans les medias, procureur de Téhéran et vice procureur d’Iran. Il est responsable de la fermeture de publications et de journaux critiques ou dissidents et de l’emprisonnement de journalistes. Il est le principal suspect de deux dossiers importants : la mort de la journaliste Irano Canadienne Zahra Kazémi et du dossier du centre de détention de Kahrizak où des manifestants ont été battus, torturés, affamés, humiliés, violés et assassinés. Il est célèbre pour un langage inapproprié et des méthodes injustes, intimidantes et brutales. Il n’a jamais été mis en accusation. En décembre dernier, Ahmadinedjad l’a nommé responsable du bureau luttant contre la contrebande de biens et de devises étrangères.






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mercredi 23 juin 2010

Commentaires d’Ali Tavakoli sur le récent transfert de son frère Madjid au bloc 350 d’Evine

Ali Tavakoli, frère du prisonnier politique Madjid Tavakoli a commenté ainsi le transfert de son frère au bloc 350 d’Evine hier :
 
Madjid a été transféré au bloc 350 d’Evine. Ce bloc est récemment devenu un endroit d’exil pour les prisonniers politiques. Les contacts téléphoniques y sont interdits, les services médicaux sont en dessous des normes et il y a des travaux, ce qui rend les conditions de vie des prisonniers de ce bloc encore plus difficiles.
 
Plus important, Madjid a dit qu’on avait demandé à toutes les personnes transférées dans ce bloc de prendre leurs affaires personnelles. D’après ce que nous savons, tous les prisonniers politiques ont maintenant été transférés au bloc 350, mais comme la liste des détenus transférés n’a pas été confirmée, il est à l’heure actuelle, difficile de vérifier les noms.
 
Madjid avait déjà évoqué le fait qu’il croyait que les pressions exercées sur lui augmenteraient et que ses conditions de vie pourraient se détériorer en juillet. Il semble également que tous ceux qui ont écrit des lettres ou des déclarations doivent être transférés dans ce bloc. Il nous faudra bien sûr attendre pour savoir ce qui s’est exactement passé lorsqu’ils publieront les noms demain.
 
Source: FaceBook d’Ali Tavakoli : http://www.facebook.com/profile.php?id=1697035462

mardi 22 juin 2010

Rooz/Farahmand Alipour: A la personne qui a changé Néda en une voix

14 juin 2010 -

Farahmand Alipour



J’écris en l’honneur de quelqu’un que je n’ai jamais vu, Néda qui a enregistré la voix et les larmes de l’Iran dans les derniers moments de sa vie. Et alors que le sang jaillissait de son cœur et de ses yeux, on n’entendait plus que les cris de ses larmes.



J’ai toujours dit que Néda était née deux fois. La première fois en tant qu’enfant d’une mère courageuse dont les cheveux sont devenus gris d’incrédulité et la deuxième fois quand un petit téléphone portable l’a porté à la face du monde. Aussi longtemps que les portraits et les posters de Néda s’inviteront sur les murs et les écrans de télévision des villes du monde, nous verrons combien le monde est petit et qu’aucune réelle distance ne sépare une petite rue du cœur de la capitale de la république islamiques des gratte-ciels de New York ou de la ville magique de Lecce dans le sud de l’Italie.



Néda n’était pas une héroïne, elle ne s’était pas entraînée à combattre la théocratie. Elle était l’une des milliers descendus dans la rue le 20 juin pour observer perplexe l’enfer que les gardes révolutionnaires du chef de la république islamique avaient créé à Téhéran. La mythologie religieuse explique que, quand l’arrogance prit le contrôle de Nimrod, il se nomma lui-même Dieu pour égaler les dieux et créa le paradis sur terre et le nomma Eden. Le paradis ne dura pas et fut détruit par un éclair. Par contraste, il est étrange que, voulant égaler les dieux, l’ayatollah Khamenei et ses substituts aient bâti l’enfer sur terre, dans les rues de Téhéran, à Kahrizak et dans des dizaines d’universités dans tout l’Iran, ce que même les châtiments divins les plus durs ne décrivent pas.



Neda était une goutte dans l’océan de la colère causée par les remarques du chef du gouvernement et les actions de son administration. Elle a été victime de la répression et de la terreur mais la caméra a enregistré sa mort et informé le monde de son existence et l’on transformé en héroïne éternelle.



Beaucoup furent tués suite aux élections présidentielles iraniennes de 2009. Certains noms ont été gravés dans l’histoire, mais d’autres n’ont jamais été entendus et leurs visages sont inconnus. Ils ont tous fait le même sacrifice et vivront, tels des tulipes, dans le jardin de la conscience de l’histoire de l’Iran et une autre personne doit raconter leur histoire. Cette tâche revient à la personne qui le mérite le plus, comme Ferdowsi mérite la louange pour l’histoire d’un héros du Sistan qui est resté éternel. Comme les lèvres assoiffées de Zeinab ont raconté l’histoire de Hossein et en ont fait l’archétype des martyrs du Moyen Orient tandis que les têtes coupées s’égaillaient autour d’elle lors de l’Ashoura.



Shariaty avait raison quand il disait que ceux qui nous ont quitté on agi comme Hossein tandis que ceux qui sont resté doivent agir comme Zeinab pour que le sang versé soit enregistré dans l’histoire pour qu’on ne l’oublie pas.



Peut-être si les derniers moments des vie de Mohsen Ruholamini, Amir Djavadifar et d’autres martyrisés à Kahrizak avaient fait l’objet de vidéo clips, le monde en aurait-il été davantage touché et même secoué. Ce qui démontre l’importance du narrateur dont le visage et le nom nous restent aujourd’hui cachés S’il n’avait pas été présent, il manquerait un élément à notre monde et à l’histoire du 20 juin.



Neda est née une seconde fois le 20 juin, cette fois plus grande et plus légendaire. Elle est née d’un soudain jaillissement et a laissé une larme sur le visage de millions de personnes dans le monde entier.



Source: http://www.roozonline.com/english/opinion/opinion-article/article/2010/june/14//to-the-person-who-turned-neda-into-a-voice.html















dimanche 20 juin 2010

Tadjzadeh: Les réformistes devraient demander pardon à la nation

Par MOHAMMAD SAHIMI, Los Angeles

15 JUIN 2010

Seyyed Mostafa Tadjzadeh est né à Téhéran en 1956. Après son diplôme d’études supérieures en sciences politiques, il part poursuivre ses études aux Etats-Unis en 1975 pour presque trois ans. Il milite dans l’association des étudiants islamiques, un groupe politique opposé au Shah Mohammad Réza Pahlavi. En 1978, quand la révolution de 1979 commence à prendre de l’élan, Tadjzadeh rentre en Iran où il fonde Towhidi-ye Khalgh avec Hassan Vaézi, Homayoun Khosravi, et Seyyed Mahmoud Yasini, militant contre le Shah. Après la révolution, le groupe de Tadjzadeh fusionne avec six autres organisations islamiques pour former l’organisation des Modjahedines de la Révolution Islamique (OIRM) [à ne pas confondre avec l’organisation des Modjahedin-e-Khalq (MKO)]. L’OIRM est l’un des principaux groupes réformistes d’Iran.

Tadjzadeh milite dans les comités de la révolution islamique et dans l’OIRM. Sa carrière politique débute en mai 1982 quand il rejoint le ministère de la culture et de la guidance islamique (Ershad). Il y travaille en étroite collaboration avec l’ancien président Mohammad Khatami qui dirige l’ershad dans le cabinet de Moussavi ainsi qu’avec le premier cabinet de l’ancien président Ali Akbar Hashemi Rafsandjani. Tadjzadeh finit par être promu premier adjoint de Khatami au ministère. Sous la pression des réactionnaires, Khatami démissionne du ministère en 1992 et Tadjzadeh également. Après l’élection à la présidence de la république de Khatami en 1997, Tadjzadeh est nommé vice-ministre de l’intérieur pour les questions de sécurité et de politique, dépendant uniquement du ministre Abdullah Nouri, un religieux progressiste.

Les élections au 6ème parlement se tiennent fin février 2000 sous la supervision de Tadjzadeh. Le conseil des gardiens (GC) disqualifie relativement peu de candidats et les élections sont donc très disputées. Les réformistes raflent 30 sièges pour la région de Téhéran, un bouleversement pour le GC et les conservateurs. Le GC commence alors à prétendre qu’il y at eu des irrégularités dans plusieurs bureaux de vote. Ils commencent par ordonner un recomptage puis annulent sans aucune preuve environ 700.000 votesàa Téhéran ; c’est le début d’une lutte féroce entre Tadjzadeh et le GC.

Le but principal du GC est de faire élire Rafsandjani et Gholam-Ali Haddad Adel à Téhéran. A l’époque, Rafsandjani est l’objet d’attaques féroces de la part des journalistes réformateurs et appartient donc au camp conservateur. La fille d’Haddad Adel est mariée à Mojtaba Khamenei, le fils du guide suprême. L’autre but du GC est d’empêcher l’élection du Docteur Ali Réza Radjaéi, journaliste proche de la coalition nationale religieuse.

Tadjzadeh insiste : il n’y avait pas eu d’irrégularités et déclare que ces élections étaient « les plus propres et les plus libres » dans l’histoire de la république islamique, ce qui est vrai. Il est clair que Tadjzadeh ne se dérobera pas, l’ Ayatollah Ali Khamenei ordonne alors au GC d’accepter le verdict populaire. Le GC a néanmoins atteint ses buts ; empêcher l’élection du Docteur Radjaei, Haddad Adel est élu à sa place. Rafsandjani, bien que 20ème à Téhéran en termes de nombre de votes, démissionne et ne siègera jamais au 6ème parlement.

Le GC traîne Tadjzadeh en justice ; en réponse Tadjzadeh porte plainte contre l’Ayatollah Ahmad Djannati, un religieux réactionnaire puissant, secretaire général du GC, l’accusant de tentative de fraude electorale. Le proces n’eut jamais lieu, Djannati étant trop puissant pour être jugé ! Mais Tadjzadeh lui, est jugé en mars 2001. Lors du procès, il se heurte à plusieurs reprises avec le juge Nasser Daghighi ; il déclare : « Certains sont en colère à propos de la façon dont le peuple a voté l’année dernière ». La cour « condamne » Tadjzadeh à un an de prison avec sursis, et lui interdit toute fonction gouvernementale pendant trois ans, espérant ainsi s’en débarrasser. En 2004, la période de trois ans étant arrivéeàa expiration, Khatami nomme Tadjzadeh conseiller principal, poste qu’il garde jusqu’en août 2005, début du premier mandat d’Ahmadinedjad.

Tout de suite après les élections présidentielles truquées de juin 2009, Tadjzadeh est arrêté par les forces de sécurité et passe des mois au secret. Il est le seul à bénéficier d’une libération temporaire sans caution, ayant refusé de mettre en place quelque caution que ce soit. Il a été opéré pour des problèmes de dos sérieux.

Il est marié à Fakhr al-dîn Mohtashamipour, personnalité politique, militante féministe, qui a franchement critiqué les durs pendant toute l’année dernière. Ils ont deux filles Arefeh et Fatemeh. Tadjzadeh est aussi doctorant de sciences politiques de l’université de Téhéran mais n’a pas pu terminer ses études.

Tout au long de sa carrière politique, Tadjzadeh n’a jamais pris de voie détournée : franc, honnête, parlant clair, direct. C’est un haut fonctionnaire sans tâche et un réformiste progressiste.

Dans une analyse très importante de la situation actuelle posté sur le site de Mir-Hossein Moussavi, Kalameh, Tadjzadeh analyse plusieurs problèmes importants auxquels la nation doit faire face. Le plus important à mes yeux et qu’il réévalue de façon critique le passé des réformistes et le rôle qu’ils ont joué dans la genèse de la situation actuelle en Iran. Il critique la position des réformistes sur la répression du début 1980 et l’exécution de milliers de prisonniers politiques.

A l’époque, les réformistes d’aujourd’hui étaient appellés « ceux qui suivent la voie de l’imam » et étaient [et sont toujours] pour la plupart des islamistes de gauche. « Imam » désigne l’Ayatollah Rouhollah Khomeiny dont les réformistes actuels étaient de fervents supporters [beaucoup clament leur fidélité a de nombreux principes de l’ayatollah]. Ce qui suit est la première partie de l’analyse de Tadjzadeh qui est, à mes yeux, un document historique important.

Père, Mére, on nous accuse de nouveau

Tadjzadeh commence son analyse en expliquant que son incarceration lui a donné l’occasion de débattre avec ses interrogateurs, des durs du régime. Au cours du processus, il s’est vite rendu compte de l’énorme fossé existant entre sa façon de penser et la leur. Il compare alors le système politique idéal des durs et le sien.

Un système politique qui mesure son pouvoir à la façon dont il oblige à avouer et à se repentir contre un autre qui le mesure à l’aune de discussions libres et de débats dans la presse.

Un système politique qui considère toute opposition ou critique comme un complot contre un autre qui corrige sa ligne de conduite suivant les critiques de l’opposition.

Un système politique qui prive ses citoyens de leurs droits les plus élémentaires comme le droit de voyager librement et les empêche de se rendre à l’étranger et crée toutes sortes de contraintes applicables à tous sauf à ses propres partisans contre un qui encourage le libre choix dans la société et lors des élections.

Un système politique dans lequel le pouvoir réside essentiellement dans la force armée et qui considère le pays tout entier comme une grande caserne dans laquelle personne n’ose demander « pourquoi et comment » contre un autre dans lequel le peuple possède la nation et où les casernes sont le reflet du pays.

Un système politique dans lequel l’étude des caractéristiques, de l’éducation et de l’intelligence des prisonniers politiques révèle qu’ils sont l’élite de la nation contre un autre dans lequel ces mêmes personnes soit dirigent la nation en tant que membres du gouvernement, soit la représentent en tant qu’élus du parlement ou de la société civile et jouissent de la plus totale sécurité.

Un système politique terrifié par les manifestestations pacifiques de ses citoyens et par leurs cris d’ « Allah o Akbar » depuis les toits de leurs maisons contre un autre qui considère ces manifestations comme un droit citoyen et une base pour améliorer et renforcer le système politique.

Un système politique dans lequel les groupes et partis politiques sont interdits d’activité dans le cadre de la constitution, même en temps de paix et de stabilité, dans lequel la condition pour la libération de prison et de détention illégale des dirigeants et membres de ces groupes et partis est la cessation de toute activité politique, contre un autre qui a dirigé la nation pendant la première décennie qui a suivi la révolution, ou, en dépit de la guerre, les dirigeants des groupes politiques ne furent jamais arrêtés.

Un système politique dans lequel l’indépendance de la justice veut seulement dire ignorer les revendications et les droits du peuple, qui durant des simulacres de procès « condamne » l’élite de la nation et la prive de ses droits contre un autre dans lequel les juges sont vraiment indépendants de l’élite au pouvoir, imperméables aux pressions des groupes de sécurité, de renseignement et de l’armée, et n’agissent qu’en conformité avec la loi.

Un système politique dans lequel les jeunes ayant fait des études veulent quitter le pays une fois le bac en poche, dans lequel chaque foire aux livres nous rappelle l’inquisition, dans lequel les étroites cellules d’isolement sont plus petites que les pièces nécessaires pour entreposer les récompenses qu’ils ont gagnées à l’étranger, contre un autre, celui que l’Imam a promis au peuple à Paris [à l’automne 1978].

Un système politique qui se classe premier en matière d’inflation et de corruption et dernier en matière de croissance économique, où presque la moitié de la population vit sous le seuil de pauvreté, où le secteur public est considéré comme rival et même ennemi d’un secteur public dont le principal but est de l’affaiblir, où les investisseurs préfèrent investirent à l’étranger, où les importations dérégulées et non maîtrisées ont écrasé la production intérieure à cause de la stratégie du gouvernement « tout ce dont l’Iran a besoin ce sont les comités d’aide ». Un tel système peut-il être un exemple de gouvernment efficace dans la région ?

Un système politique qui condamne la dictature, les membres du Conseil de Sécurité de l’Onu, le contrôle des médias par une poignée d’individus, qui accuse les Etats-Unis d’appliquer deux poids deux mesures, n’a pas moralement le droit d’user des mêmes stratagèmes à l’encontre de ses propres citoyens.

Un système politique dans lequel « le bonheur est perdu » [paraphrase du poète Shafiei Kadkani], qui se classe à la première place pour l’interdiction de sa presse et l’emprisonnement de ses journalistes, dont le processus de disqualification des candidats aux élections est pire que ceux appliqués en Irak, en Afghanistan, au Liban et en Palestine ne peut prétendre être le libérateur de ces mêmes nations et un modèle pour le monde musulman.

Dans le système politique qui a mes faveurs, les séminaires religieux sont indépendants, les universités ne sont pas des casernes, les professeurs émérites à l’esprit indépendant ne sont pas contraints à la retraite ou licenciés ; les étudiants ne sont pas classés selon leurs activités politiques, ne sont pas expulsés en masse, la mixité de l’université n’est pas un problème pour ses dirigeants, les étudiants ne sont pas contraints de suivre les ordres de l’administration de l’université pour obtenir leurs diplômes.

Dans le système politique qui a mes faveurs, les fonctionnaires réfléchissent aux solutions à apporter au chômage, à la dépression, au désespoir et à l’addiction de la jeunesse, et ne s’occupent pas du maquillage ou des vêtements des femmes tout en prétendant s’attaquer à la corruption sociale et culturelle, en autorisant les programmes télé par satellites étrangers sans difficulté, mais fermant les sites Web. Dans mon système politique, le mensonge n’est pas une façon de gouverner.

Dans mon système politique, qui émane de la glorieuse révolution, ne pas révéler l’existence de Kahrizak est honteux, la constitution n’est pas un outil de répression du peuple mais un document qui représente le sang des martyrs et le vote du peuple, un document qui garantit les droits du peuple et sa liberté, l’application de l’article 27 [qui autorise les rassemblements pacifiques] et des autres droits humains du peuple comme la formation de partis politiques, une presse libre, l’interdiction de la torture, une peine de mort qui ne serait pas appliquée à la légère, l’indépendance du pays, l’intégrité de son territoire et la protection des intérêts nationaux.

Mon système politique n’attaque pas les cités universitaires tous les 10 ans. C’est un système politique fondé par le dirigeant de la révolution dont le mot d’ordre était «le critère, c’est le vote du peuple » qui a défendu le droit de chaque génération à décider de son propre sort. Dans ce système politique, les minorités ethniques, culturelles et traditionnelles ne sont pas considérées comme des menaces contre l’unité nationale.


De la révolution de velours au trouble à la circulation

Tadjzadeh déclare ensuite que lui et ses camarades ne voulaient pas renverser le système et n’ont pas enfreint la loi. Après le début des interrogatoires, les enquêteurs ne pouvaient plus défendre « une société qui parle d’une seule voix » ou appeler leurs sympathisants « le parti de Dieu » et ceux de l’opposition « le parti de Satan ». Ils étaient forcés d’admettre qu’ils étaient en faveur d’une société à plusieurs voix et ont déclaré que « la méthode de Kayhan ne résoudra pas les problèmes » [allusion à l’organe des durs qui accuse de larges pans de la société d’être des agents à la solde de l’étranger, anti-islamiques et anti-iraniens]. Il explique ensuite qu’il a été accusé de favoriser une révolution de velours pour renverser le système politique.

Attention. C’est une accusation à double tranchant qui, avant de couper les mains du peuple, coupera les vôtres, car elle sous-entend que la république islamique d’Iran est semblable aux régimes communistes ou apparentés qui furent renversés par des révolutions de velours.
 
Mon système politique est basé sur les trois piliers de la république, l’islam et l’Iran, ce qui est totalement différent des régimes communistes qui n’ont pas réussi à interpréter le marxisme de façon démocratique ; mon système lui peut interpréter l’Islam de façon démocratique.

J’ai rappelé à mes interrogateurs que toute accusation portée contre nous doit, selon la constitution et la législation en vigueur, avoir des bases légales et non idéologiques, et, même s’il y a un aspect politique ou idéologique, il doit être discuté librement en public, pas en prison durant les interrogatoires. Si, malgré ses erreurs et quelques mesures extrêmes, je peux encore défendre la république islamique tout en protestant contre l’emprisonnement du corps malade de Hadjarian [il est a moitié paralysé], contre la bastonnade du fils de Mehdi Karroubi dans une mosquée, les insultes proférées à son encontre, contre les bastonnades et les blessures des meilleurs de nos enfants dont le seul « péché » était de réclamer leurs votes et de revendiquer leurs droits, contre l’attaque à l’encontre de ceux qui pleuraient Hossein et le fait de les jeter depuis les ponts, et contre le fait que tout ceci à été commis au nom de Dieu, c’est parce que nous avons foi en les mots de l’ancien dirigeant de la révolution qui disait que bafouer le moindre droit du peuple était bafoué, c’était fouetter les épaules du prophète Mahomet. C’est ce genre d’interprétation de l’Islam qui nous a donné notre glorieuse révolution, pas celle de Mesbah, qui, à l’époque, ne s’occupait que de discréditer le Docteur Shariati (1933-1977) et d’alléger la charge de travail de la Savak.

Tadjzadeh mentionne le trouble à la circulation qui figure parmi les accusations portées contre certains dirigeants réformistes dans la journée du 15 juin 2009, lors des manifestations énormes à Téhéran, les procureurs ne trouvant aucune autre base légale d’accusation.


Mes Confessions

Devant la jeune génération je déclare que le système politique issu de la révolte et la constitution pour laquelle nous avons voté ne sont pas ceux que les forces armées considèrent comme leur propriété personnelle, se rangeant dans la même catégorie que les forces armées du Pakistan et de Turquie. Cette déclaration est absolument nécessaire car l’image donnée de la république islamique en prison, dans la presse officielle et ailleurs est très laide et « à la ressemblance de Frankenstein ». Ils essaient de faire croire que l’Imam était semblable à Djannati et Mesbah, mais ne reconnaissent pas que de telles comparaisons erronées ne justifieront en rien la dictature et la répression ; elles ne feront qu’aider la jeune génération à rejeter en bloc la religion, ce qui se produit déjà et que Motahhari (1920-1979) avait déjà dénoncé….
 
Quand les enquêteurs me rappellent certaines fautes de la première décennie de la révolution et m’appellent moi et ceux qui suivent la voie de l’Imam, les réformistes actuels, des « fascistes », je leur rappelle la conduite fasciste actuelle qui a lieu devant les yeux de la nation entière, et j’ai expliqué que tout le monde avait fait des fautes à l’époque, mais aujourd’hui, au lieu de perpétuer les aspects positifs de l’époque, ils réitèrent les mêmes fautes alors que le pays n’est pas en guerre et ne souffre pas d’un terrorisme aveugle et à grande échelle. C’est pourquoi nous ne pouvons pas les considérer comme des fautes mais comme le résultat de l’inexpérience révolutionnaire.

Notre faute fut de ne pas résister aux erreurs des tribunaux révolutionnaires, même si ceux qui suivaient la voie de l’Imam ont écrit une déclaration en 10 points au procureur général au printemps 1360 [1981] [déclarant que tous les groupes politiques étaient libres d’agir tant qu’ils se tenaient éloignés de la lutte armée et que leur action était pacifique] mais n’ont pas pu (et le terrorisme aveugle de 1981 et la guerre qui nous a été imposée nous en a empêché) mettre cette déclaration en application avant que toutes les dérives anti-démocratiques ne soient éliminées. La catastrophe c’est qu’en temps de paix et en l’absence d’attaques terroristes, au lieu d’élargir les libertés dont certaines ont survécu à la guerre, une faction politique tente de façon non démocratique, en ignorant et niant beaucoup de réussites de l’époque de la défense sacrée, ils répétent nos erreurs de l’époque révolutionnaire et transforment les exceptions de cette époque en règlements.

Je vais le dire aussi clairement que possible, notre faute ce fut notre silence consentant sur les tribunaux révolutionnaires ; mais les arrestations en masse de critiques respectant la loi, transformer des citoyens manifestant en « Kahrizaki » [ce qui veut dire, les torturer, les violer et même les tuer dans des centres de détention comme celui de Kahrizak], leur tirer dessus est tellement répugnant que ce ne sont plus des « erreurs ». Nous devons donc avouer, mais pas lors de simulacres de procès et pas de la façon dont les enquêteurs veulent que nous le fassions pour des délits que nous n’avons pas commis, mais face à la nation et sur des bases factuelles. La génération de la révolution doit avouer, mais pas ses efforts actuels pour plus de démocratie, de droits humains. Nous avons bien sûr essayé de tirer les enseignements de nos fautes et d’amender notre conduire et notre manière de penser après la guerre.

Dans le même temps, j’avoue que si nous avions protesté contre le traitement inapproprié réservé à l’ayatollah Shariatmadari (1905-1985) [accusé d’être un monarchiste, défroqué et assigné à résidence jusqu’à sa mort] pour préserver la dignité des maraadje [source d’inspiration, désigne les grands ayatollahs] nous n’en serions pas là : la dignité et le respect dus à de tels « mardja » comme feu l’ayatollah Montazéri, les ayatollahs Vahid Khorassani, Moussavi-Ardabili, Sanei, Bayat Zandjani, Dastgheyb Shirazi, Tahéri Esfahani, Djavadi Amoli sont oubliés même par la télédiffusion nationale ; même le domicile et le bureau du petit-fils de l’Imam et le mausolée de l’Imam, même ceux de feu Sadoughi [assassiné par le MKO] et Khatami [père de l’ancien président] ne sont plus à l’abri.

Donc, si fautes il y a eu, et il y en a eu, ce ne sont pas celles que les enquêteurs pensent, et si nous devons avouer et demander pardon, ce qui est notre devoir moral, c’est pour le traitement inapproprié reçu par Bazargan (1907-1995) et le Docteur Sahabi (1905-2002). Nous devons aussi demander pardon à tous ces militants politiques qui ne voulaient qu’avoir des activités politiques légales, mais dont les droits furent bafoués sous diverses prétextes. Nous devons demander pardon aux citoyens pour leur avoir imposé un certain style de vie et avoir empiété sur leur vie privée. Nous, les Iraniens moyens, pensions que nous pouvions fermer les vignes sans ouvrir la porte aux prétextes. Notre erreur fut de sacraliser des activités séculières, nous ignorions que beaucoup de choses sacrées ne le seraient plus. Notre faute la plus grave fut d’étendre les relations politiques de l’époque esmat [innocence, se réfère à l’ère du prophète Mahomet et des imams shiites] à l’époque Gheybat [cachée, l’époque où le Mahdi, le 12ème imam shiite est caché dans l’attente de son retour]…Le résultat fut l’affaiblissement des croyances religieuses de notre jeunesse… Nous aurions du déclarer que, contrairement à toutes les autres révolutions, les violations des droits humains ne sont ni légales, ni islamiques, ni morales, quelles que soient les conditions, même en temps de guerre et de terrorisme. Nous n’aurions pas du utiliser la trahison de certains comme excuse pour dévier des voies légales et humaines.

Donc, de mon point de vue, la condition nécessaire pour affronter ceux qui veulent nous forcer à « avouer » c’est de révéler et de condamner leurs agissements, c’est aussi de demander pardon à ceux qui furent vraiment opprimés et d’accepter que, si nous avions rempli nos devoirs moraux et nationaux en temps en en heure, nous n’aurions pas été piégés par des aveux et des actes de repentir sous la contrainte. Donc, à la suite du Docteur Shariati, je dis à ceux de ma génération : « Père, Mère, nous sommes de nouveau accusés, non par les interrogateurs mais par la génération actuelle. » Si nous nous considérons comme des partisans de la révolution islamique et des défenseurs du principe : « Chaque génération doit décider de son sort. », nous devons préparer les conditions nécessaires à ce que les promesses de Neauphle-le-Château et Béhesht-é Zahra puissent se matérialiser [l’ayatollah Khomeiny y avait promis un système politique démocratique]

Il ne faut pas reporter la haine ressentie dans les prisons à l’intérieur de la société ; de la même façon, il ne faut pas permettre que les erreurs de l’époque révolutionnaire se répètent de nos jours. Ce qui veut dire que nous acceptons nos propres fautes et que nous sommes prêts à répondre aux accusations de la nouvelle génération. Si nous n’avouons pas nos fautes à la nouvelle génération, alors les conditions seront favorables à l’émergence de ceux qui justifient leurs fautes les plus graves par les nôtres. Nous ne pouvons pas prétendre adhérer à la déclaration de Paris sur la démocratie, les droits humains, la liberté d’expression, la presse, les partis politiques, la radiotélévision nationale, le droit des femmes et des ethnies, les élections libres, la république et son lien à l’islam, sans parler franchement des racines, des raisons, des obstacles et des erreurs qui les empêchent de se matérialiser.

En d’autres termes, si le groupe politique qui porte l’étendard de l’interdiction du militantisme politique a traîné les membres des campagnes électorales en justice et présente nos erreurs de la première décennie de la révolution comme des aspects positifs de la révolution ; nous devons également clairement déclarer à la nation iranienne ce que nous considérons comme des erreurs commises par nous et ce dont nous sommes fiers. Ce serait l’opposé de ce que le parti des casernes fait en prétendant que les erreurs de la première décennie de la révolution et leur répétition ne sont qu’une façon « révolutionnaire » de protéger le régime politique et d’essayer ainsi de fermer les portes à jamais à une presse libre, à des partis politiques libres et à des élections libres.

Si je n’accepte pas l’invitation [des interrogateurs à avouer] ; je considère par contre de mon devoir de répondre aux questions de la jeune génération demandant pourquoi et comment dans le système politique résultant d’une des révolutions les plus populaires de l’époque contemporaine, la pensée de Mesbah gouverne et a pris la place de la voie parlementaire de Modarres (1870-1937). Comment les médias officiels, manipulés par certains, traitent une grande majorité du peuple de « poussière », de bétail et d’enfants au lieu de s’excuser de leurs agissements illégaux, tentent d’emprisonner les militants de la campagne électorale au secret et les forcent à s’excuser. Pourquoi les erreurs des tribunaux de la première décennie refont surface en la personne de Mortazavi [ancien procureur de Téhéran]. Pourquoi la télévision qui diffusait les débats politiques libres au printemps 1360 (1981) est-elle devenue ce qu’elle est aujourd’hui. Pourquoi le Kayhan de Seyyed Mohammad Khatami [rédacteur en chef dans les années 80s] est devenu le Kayhan de Shariatmadari [rédacteur en chef actuel]. Comment Sadegh Laridjani a remplacé le Docteur Behesti (1928-1981) [assassiné par le MKO] et Rahimi [premier vice-président et accusé de corruption sur une grande échelle] a remplacé le premier ministre de l’imam [Moussavi]. Comment Seyyed Ahmad Khatami [religieux dur, sans relation avec Mohammad Khatami] a remplacé Taleghani (1911-1979) [religieux progressiste très populaire]. Nous devons nous excuser de la part que nous avons prise dans la création de cet état de fait et en discuter les raisons et les racines.

Les excuses auprès de la nouvelle génération ne devraient pas se limiter à ce que j’ai brièvement décrit. Elles doivent se faire dans une atmosphère de débat et d’échange d’idées, et il y a peut-être de nombreuses autres erreurs que j’ignore, mais la nouvelle génération peut m’en informer par ses critiques constructives.

Quoi qu’il arrive à Tadjzadeh, une chose est claire. C’est un patriote qui a servi la nation avec honneur et dignité, a fait de grands sacrifices, a toujours été un réformiste fier et a toujours défendu un Iran démocratique. Son manifeste, son honnêteté absolue pour admettre les erreurs commises par les réformistes représentent un grand tournant dans l’histoire du mouvement réformiste/Vert/démocratique et lui sera grandement utile.

Source :http://www.pbs.org/wgbh/pages/frontline/tehranbureau/2010/06/tajzadeh-reformists-should-ask-the-nation-for-forgiveness.html