dimanche 5 décembre 2010

Un message de prison - Lettre de Bahareh Hedayat pour la journée de l'Etudiant

Bahareh Hedayat est membre du bureau pour le Renforcement de l’Unité (Tahkim é Vahdat) une organisation estudiantine créée en 1979. Elle a été arrêtée en décembre dernier pour la cinquième fois et a été condamnée à 9.5 ans de prison. C’est la plus longue peine donnée à un membre de Tahkimé Vahdat à ce jour. Pendant son incarcération, elle a été transférée à l’isolement à de nombreuses reprises et interrogée ; elle est l’objet de fortes pressions. 



Bahareh Hedayat a écrit le message suivant pour commémorer la Journée de l’Etudiant en Iran, le 7 décembre 2010 (16 Azar 1389) : 

Voilà longtemps que nous nous sommes dit au revoir lors de la bataille passionnée où nous avons crié ensemble pour triompher de l’obscurité. Nous voulions faire notre possible pour cheminer vers des rivages de lumière et d’amour. Nous pensions qu’à la fin, notre détresse et nos souffrances prendraient fin et que la liberté serait à portée de main pour notre peuple.

Les cœurs unis, nous étions tous ensemble mais désavantagés lors d’une injuste bataille, nous avons combattu la tyrannie de nos mains vides. Pas seulement dans la rue, mais aussi dans nos cœurs ; nous avons choisi d’être calmes et recueillis, mais quand nous avons affronté la cruauté, nos chagrins se sont multipliés. Jusqu’au jour de la floraison, largement et étendue, quand la brise de la connaissance soufflera de chaque ville et village, nous avons imaginé nos universités ornées d’arches florales colorées et parfumées, pas de cellules de prison.

Dans nos rêves, il n’a y a pas de place pour les barbelés ou les grilles de métal défendant l’entrée dé nos écoles ; pas de lettres d’expulsion pour les étudiants et l’ombre de la peur se sera envolée loin de nos universités. On n’interdira plus aux professeurs d’enseigner, et nos condisciples qui n’entendront plus l’écho des regrets, ils ne seront plus convoqués pour interrogatoire.

Mes condisciples, nous sommes épuisés mais nous n’avons pas courbé le dos, nous n’avons pas cédé. Nous sommes toujours debout en dépit de nos cœurs agités et blessés. Nous sommes le témoignage vivant contre les tentatives des dictateurs de piller une terre fertile nourrie des sacrifices altruistes des générations passées et présentes.

L’injustice imposée aux universités iraniennes, à notre patrie et à ses enfants n’est que la dernière tentative de ces cœurs noirs qui ne peuvent plus se reposer tranquillement parce que la jeunesse d’Iran a une vision pour libérer notre nation. J’aurais souhaité que nos doux rêves ne soient des cauchemars pour personne. Hélas, nous sommes face à des individus qui ne sont que fausseté et veulent nous polluer par la tricherie réciproque et la revanche. Soyez prévenus, face à ce mal absolu, il vous faudra garder votre conscience et rester vrai. Autrement, vous ouvririez votre cœur à la haine et choisiriez de suivre le chemin des ténèbres.

Mes frères et sœurs courageux et patients, l’hiver nous amène encore une fois au mois d’Azar, ce mois qui était nôtre pour frapper au cœur des ténèbres, un mois qui est nôtre pour toujours. Le froid, les murs de briques de la prison d’Evine, les jours et les nuits sans fin tentent en vain de me séparer de vous, mais je me souviens toujours des anciennes Journées de l’Etudiant que nous avons passées ensemble et je me languis des jours futurs qui seront verts, splendides et ensoleillés.

Ils ont bien élevé un mur entre nous, mais je suis toujours avec mes condisciples, à leurs côtés, main dans la main, nous chantons en cœur, nous levons le poing pour hurler que notre amour ne sera touché par aucun obstacle. Pas de place dans mon cœur pour la tristesse ou la solitude ; la pureté de notre empathie prend toute la place.

Ces jours et ces nuits qui s’enchaînent, froids et tristes finiront bien par s’arrêter un jour pour que l’espérance de la vie nous entoure de partout. Cela ne fait aucun doute dans mon esprit ; nous respirerons dans un pays libre, nous célèbrerons ensemble la liberté dans un futur radieux. Touchant des cieux d’azur, nous saluerons de nouveau le soleil dans nos universités et dans tout ce pays qui sera libre, libre, enfin libre. Ce jour approche, repoussons tous les doutes qui pourraient persister. Nous devons y croire et nous élever comme avant, en toute conscience et espérance. 

J’arrive, j’arrive, j’arrive
Les cheveux libres aux senteurs de sous-sol,
Les yeux supportant la profondeur des ténèbres
La lande moissonnée au-delà…
J’arrive, j’arrive, j’arrive
Pour diffuser l’amour à l’entour
A ceux qui le désirent
Et à la jeune fille debout au bord, pleine d’amour
Je dis de nouveau bonjour

Bahareh Hedayat

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