Ces deux derniers jours, nous avons été témoins d’assignations à comparaitre et d’arrestations de militants civiques et des médias en Iran. Mashallah Shamsolvaezine, journaliste éminent et membre de l’association iranienne des journalistes, a été convoqué et interdit de sortie du territoire, Reyhaneh Tabatabai, journaliste ayant travaillé pour le journal réformateur Shargh, a été arrêtée et envoyée à la prison d’Evine, Saba Azarpeik est toujours détenue à l’isolement depuis plus d’un mois et Mehdi Khazali, critique éminent des excès du gouvernement iranien qui a fait la une quand il a déclaré que l’ancien président Ahmadinejad avait des origines juives, a de nouveau été arrêté et emmené à la prison Radjai Shahr de Karaj.
Mohammad-Saleh Khazali, fils de Mehdi, a déclaré à Rooz qu’il ne savait pas pourquoi son père avait été arrêté. « Mes parents voyageaient au nord de l’Iran près de Mahmoudabad-Nour vendredi lorsque des agents ont arrêté mon père et l’ont transféré à la prison de Radjai Shahr. Ils n’ont donné aucune justification à son arrestation mais ils étaient bien en possession d’un mandat d’arrêt. Ils ne nous ont rien dit d’autre. On nous a appelés de la prison de Radjai Shahr et on a laissé un message sur le répondeur nous expliquant que notre prisonnier était en quarantaine. On nous a également dit que notre prisonnier était en bonne santé. »
Nous lui avons demandé si cette détention était liée au dossier précédent ou s’il s’agissait d’un nouveau dossier à son encontre, le fils Khazali a déclaré : « Je n’en ai aucune idée. S’il s’agit du dossier précédent, il a été amnistié par le guide suprême. S’il s’agit d’un nouveau dossier, on aurait alors dû le convoquer dans les règles pour lui expliquer la cause de cette arrestation. Ils se sont juste précipités et l’ont emmené. Mon père avait reçu une lourde peine de 14 ans et a été libéré suite à l’amnistie décrétée par le guide suprême. Quand on a vu que mon père continuait à travailler, ils ont remis l’amnistie en questions. »
Il y a quelques mois, Khazali a déclaré que le procureur d’Ispahan avait ouvert un nouveau dossier à son encontre pour trouble à l’ordre public et insulte à fonctionnaire dans l’exercice de ses fonctions. Il a dit que c’était son treizième dossier et a ajouté que ce dossier n’avait pas fait l’objet d’une instruction mais avait été envoyé directement au tribunal. Mehdi Khazali avait dit auparavant que le procès pour ce nouveau dossier devait avoir lieu en février/mars de cette année, qu’il ne s’était pas rendu au tribunal mais avait envoyé une requête pour connaitre l’identité du plaignant. Khazali a été incarcéré six fois depuis l’élection présidentielle controversée de 2009 et a fait de nombreuses grèves de la faim durant ses incarcérations.
Arrêtée et interdite de sortie du territoire.
Une autre journaliste, Reyhaneh Tabatabai a été envoyée à la section féminine d’Evine après son arrestation pour purger sa peine de six mois pour un nouveau dossier. Elle a été jugée coupable de « propagande contre le régime » accusation basée sur son adhésion à l’association de la jeunesse nationale durant l’élection présidentielle de 2013, sa participation à un rassemblement de jeunes réformateurs a Shahr-e-Kord, à ses voyages dans les provinces du Sistan-Baloutchistan et de Gorgan et à des insultes sur sa page Facebook contre les candidats Said Djalili et Mohammad-Bagher Ghalibaf. Une caution de 200 million de tomans (environ $60.000) a été déposée il y a quelques jours mais elle est toujours en prison pour purger sa précédente peine. Elle avait également été arrêtée auparavant à deux reprises en 2010 et 2012 et avait, les deux fois, été libérée sous caution.
Parlant à l’agence de presse estudiantine ISNA de son arrestation, Shamsolvaezin a déclaré : « J’ai reçu deux citations à comparaitre ce matin, la première du tribunal d’Evine me convoquant dans les trois jours pour fournir des explications, faute de quoi, je serai arrêté. La seconde ne précise pas qui me convoque mais m’annonce mon interdiction de sortie du territoire, ajoutant que je peux me rendre au tribunal dans un délai de 20 jours pour faire appel de cette interdiction. » Sa dernière arrestation était liée à l’élection de 2009 ; il avait alors été également interdit de sortie du territoire. Cette interdiction expirait l’année dernière.
Aucune nouvelle d’une autre journaliste
La situation de Saba Azarpeik reste obscure et elle n’a eu aucun contact avec les membres de sa famille depuis son incarcération le 28 mai. Sa mère a posté une note sur sa page Facebook : on lui a intimé l’ordre de ne pas parler et de ne pas diffuser de nouvelles de la détention de sa fille faute de quoi, on l’a menacée de s’en prendre à sa fille.
Madame Azarpeik a expliqué : « Saba est restée à l’isolement pendant 24 jours, nous n’avions aucune nouvelle d’elle et de la cause de son incarcération. Il est très dommage que dans un pays islamique, dont les dirigeants se prétendent des fidèles de l’islam, où ceux qui interrogent les détenus et les enquêteurs se qualifient de musulmans, la plupart des droits des musulmans ne soient pas respectés. Ils me menacent en disant que si je poste quoi que ce soit sur Facebook, le dossier de ma fille serait en danger. Je ne connais pas de religion où les enfants soient otages et où l’on menace les mères de mettre en danger la vie de leurs enfants.
Je me suis rendue au tribunal pendant deux jours mais je n’ai pas reçu ce qu’on m’avait promis. J’ai rêvé que ma fille me contactait et qu’on la forçait à me dire de ne parler à personne de sa visite sinon, si le premier assesseur du tribunal l’apprendrait et cela jouerait contre elle. Je ne l’ai pas revue après cela. Je dis à ceux qui l’interrogent, si mon angoisse pour ma fille vous réjouit, alors au moins MAN UP et relâchez-la : sa grand-mère ne peut plus manger, on est obligé de la nourrir à la cuiller, elle réclame sans arrêt sa petite-fille, récite des poèmes en pleurant et ne dort plus de la nuit. Où est l’humanité, où est l’islam ? »
D’après sa mère, Saba est accusée de propagande contre le régime.
Saba a été arrêtée le 28 mai ; les autorités ont contacté sa famille une seule fois mais sans lui donner les raisons de son arrestation.
Elle a été arrêtée en même temps que 18 autres journalistes la fois précédente. Sa mère a expliqué que, lorsqu’ils avaient envahi leur domicile, ils avaient giflé son fils alors que toute la scène était filmée, puis l’avaient emmenée devant ses yeux. « Je voudrais dire aux autorités que ce n’est pas une façon de traiter les jeunes. La prison n’est pas une solution, elle produira l’effet contraire. »
Source : http://www.roozonline.com/english/news3/newsitem/archive/2014/june/23/article/filling-prisons-with-journalists.html
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