Tandis que, le 8 mars, on célébrait la journée internationale des femmes dans le monde entier, les féministes iraniennes interviewées pour l’occasion ont dit qu’elles croyaient que la condition des femmes en Iran se détériorait au fur et à mesure que les pressions et les restrictions sur leurs activités augmentaient. Malgré tout, elles restaient pleines d’espoir et optimistes, soutenant que leur mouvement renaîtrait en même temps que la nouvelle année persane (l’année 1391 commence le 20 mars) avec vigueur et dynamisme. Alors que dans certains pays la journée internationale de la femme est un jour férié officiel, la république islamique ne reconnaît pas cette journée. Les féministes iraniennes la célèbre vraiment de toutes les manières possibles. Un site web qui poste des nouvelles relatives aux femmes, Kanoune Zanane Irani (Centre pour les femmes iraniennes) a annoncé que la journée internationale des femmes a été célébrée dans une petite maison de Téhéran. Suivant le rapport, la journaliste Jila Bani Yaghoub et des militantes sociales, Shahla Forouzanfar, Alieh Eghdamdoust, Minou Mortazi Langueroudi, Haleh Safarzadeh, Nahid Djafari, Setareh Hashemi, Alieh Matlabzadeh ainsi que l’époux de l’avocate Nasrin Sotoudeh, Reza Khandan, ont célébré cette journée en discutant les problèmes actuels et les réalisations des femmes.
Les Iraniennes à l’extérieur de l’Iran ont aussi célébré la journée internationale des femmes et ont honoré les femmes et leurs réalisations à travers le monde. Comme l’année persane tire à sa fin, les féministes ont publié plusieurs rapports dans les médias et les réseaux sociaux, discutant et évaluant le mouvement féministe et les effets des élections présidentielles contestées de 2009. Certains ont loué les militantes et leur travail tandis que d’autres critiquaient les actions. Parvine Bakhtiarnejad, chercheuse, féministe et militante sociale a écrit sur le site Feminist School que cette année, le 8 mars s’etait changé en journée « de solidarité et d’autocritique ». Dans son article, elle mentionne la participation des femmes dans les groupes de discussion et leur soutien aux différents évènements liés aux problèmes féminins qui ont traversé les années comme la Campagne pour un Million de Signatures, la Campagne contre la Lapidation, les différentes coalitions comme celle contre la soi-disant loi de protection de la famille ou celles apparues à l’occasion des élections ; elle dit que ces évènements ont suscité une grande solidarité parmi les femmes sur le chemin de l’égalité. Dans l’article publié, Madame Bakhtiarnejad objecte par ailleurs que le départ d’Iran de plusieurs militantes avait eu un impact négatif sur la vigueur et l’intensité des projets féministes et de la solidarité. « Il n’y a aucun signe de solidarité pour un programme commun, comme si les idéaux féminins, s’étaient peu à peu évanouis dans les cieux. Chaque personne se mure dans sa tour sans programme commun et sans pouvoir communiquer. »
Suivant les rapports des organisations internationales des droits humains, après les dixièmes élections présidentielles en Iran (en 2009), l’émigration des militants iraniens de tous bords a considérablement augmenté ; parmi eux, des féministes. Asieh Amin et Mansoureh Shodjaï, deux figures de premier plan du féminisme iranien, ont parlé à Rooz de la situation du féminisme dans le pays. Répondant à une question sur l’effet de ces migrations sur le mouvement féministe et problèmes des féministes, Madame Shodjaï a dit : « Le mouvement pour le changement en Iran est réalisé par les militants en Iran ; à l’étranger, il ne s’agit que de soutien et de promotion. » Elle a dit ne pas croire à beaucoup de solidarité parmi les militantes qui ont récemment quitté le pays. « Tandis que les voyages, courts ou longs, auraient pu créer des réseaux de collaboration organisée, on ne voit pas beaucoup de solidarité et d’institutionnalisation au moins parmi les féministes de premier plan. C’est une critique qui s’est fait jour parmi les féministes de l’étranger. A l’intérieur de l’Iran, nous avons été témoins de coalitions qui ont réussi à se substituer aux institutions de la société. On aurait pu faire de même à l’étranger, mais non. » Les seuls efforts coordonnés à l’extérieur du pays sont venus du groupe des Mères en Deuil, selon Shodjaï. Mais elle précise alors que le mouvement féministe se définit par ses exigences d’égalité ; c’est le cœur de son activité, c’est pourquoi le groupe ne se relève pas car le groupe ne prend pas le féminisme comme le cœur de son militantisme.
Madame Amini dit que, malgré le départ de beaucoup de femmes d’Iran, le mouvement conserve sa solidarité générale et son organisation. « L’une des principales activités du mouvement féministe ces dernières années a été de participer à différentes coalitions sur des sujets spécifiques. Des déclarations, des lettres et des articles sont là pour démontrer que la solidarité existe. Ces deux dernières années, une partie du mouvement féministe a été contrainte de quitter l’Iran, une autre partie a été emprisonnée, tandis qu’une troisième était réprimée par les autorités. Et pourtant, on publie toujours beaucoup de déclarations et de points de vue, en fait, plus qu’aucun autre groupe social. » Amini croit que les évènements qui ont suivi les élections présidentielles contestées de 2009, en particulier les contraintes imposées sur les activités des groupes sociaux n’ont causé aucune diminution dans le travail des groupes féministes. D’après elle, les activités liées à la diffusion des informations ont en fait augmenté durant cette période dans le sens où les médias se sont montrés plus réceptifs à ce genre d’activités et de rapports. Elle croit que les militantes de l’étranger ont également répondu aux problèmes des femmes d’Iran avec la même intensité que par le passé.
Shojaï approuve ce dernier point et admet qu’il y a beaucoup de preuves pour indiquer que le mouvement féministe est aussi actif que par le passé. Selon elle, un des exemples en est l’activité des sites Web qui s’occupent des problèmes des femmes. Des sites comme Feminist School, Center for Iranian Women et le site sur la loi de protection de la famille font partie de ceux qui publient des rapports vigoureux sur les problèmes des femmes. Un autre signe de la croissance de ce militantisme est le nombre d’ordonnances judiciaires rendues à l’encontre des femmes, les arrestations et l’incarcération de féministes, prises pour cibles pour avoir coopérer avec le mouvement et pris part aux évènements pour la démocratie en Iran. Le troisième marqueur est le nombre de déclarations et de rapports analytiques publiés sur les problèmes des femmes. Ils sont élaborés à l’intérieur de l’Iran et indiquent la vigueur du mouvement.
Elle croit également que beaucoup de choses se sont passées en dehors de l’Iran pour les problèmes des femmes ces dernières années. Elle ajoute cependant que le discours principal sur le mouvement féministe est défini par les femmes vivant à l’intérieur de l’Iran. Les autorités iraniennes ont augmenté la pression et les contraintes sur les militantes. Exemple le plus récent, Nargues Mohammadi, vice-présidente du Centre Iranien des Défenseurs des Droits Humains ; elle a été condamnée à six ans de prison pour ses activités légales. Madame Shojaï croit que le régime n’a malheureusement fait montre d’aucune flexibilité à l’égard des militantes. « Beaucoup de femmes sont habituellement citées à comparaître, interrogées et condamnées à de lourdes peines de prison ou on leur interdit d’exercer certaines activités ». Selon elle, la situation générale des femmes n’a pas changé cette année; en fait, les pressions sociales, la discrimination dans l’éducation, le port du voile et d’autres problèmes se sont intensifiés, rendant la situation pire qu’auparavant. « Et pourtant, le mouvement féministe continue à vivre ; c’est même le principal mouvement social du pays. »
Source : http://www.roozonline.com/english/news3/newsitem/archive/2012/march/19/article/the-womens-movement-carries-on.html
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