samedi 20 août 2011

Dernière lettre du bloggeur emprisonné Hossein Ronaghi Maleki au procureur de Téhéran


Je vous salue respectueusement. 

Le 29 juillet 2011, vous m’avez convoqué pour que je vous parle de mon état physique et de mes problèmes. Vous m’avez promis de me rendre visite au bloc 350 pour voir de vos yeux les difficultés de ce bloc d’ici à 2 ou 3 semaines.

J’aurais aimé que vous teniez votre promesse pour pouvoir vous remettre personnellement cette lettre et ne pas être obligé de me fier à des moyens indirects pour qu’elle vous parvienne.
Mes codétenus et moi-même attendions de vous voir, mais, comme d’autres officiels de la république islamique, vous n’avez pas tenu votre promesse.

Monsieur le procureur, je me souviens de l’époque où vous êtes entré en fonctions : on a publié vos interviews dans les journaux Mardomsalari, Etelaat et Hemayat. Vous y souligniez que vous mettriez fin à l’influence des agences de renseignement sur la justice.

A l’époque, vos paroles indiquaient qu’un grand changement aurait lieu dans la justice. Aucune des lois gouvernant ce pays ne permettent aux agences de sécurité et à la police d’influencer légalement la justice.

Mais j’ai commencé à en douter en août 2010, lorsque l’ordre de libération provisoire me concernant, émis par la 26ème chambre du tribunal révolutionnaire assortie d’une caution de $300.000 a été annulé par l’IRGC.

Mes doutes se sont plus tard changés en certitude. Vous aviez indiqué que le bureau du procureur avait accepté ma libération pour raisons médicales. Cependant, l’IRGC s’y est opposé et a déclaré que, même contre un million de dollars, Hossein Ronaghi Maleki ne bénéficierait pas de permission.

Vous souvenez-vous avoir dit que le bureau du procureur ne pouvait rien faire si l’IRGC s’opposait à la permission ? Vous souvenez-vous que je vous ai parlé des tortures dans les centres de détention du ministère du renseignement et de l’IRGC ?

Je vous ai expliqué toutes les violations des lois et règlements du bureau des prisons, de la constitution et du code pénal islamique ayant lieur dans ces centres de détention.

Vous avez dit que ces problèmes ne vous regardaient pas, que vous, le procureur, n’y pouviez rien. Vous souvient-il avoir dit que vous n’étiez pas impliqué dans ces problèmes ?

Vous souvenez-vous que je vous ai expliqué mon mauvais état physique du à deux opérations rénales, à des calculs dans la vésicule biliaire et à des dents brisées, un cadeau de ceux qui m’interrogeaient ?

Vous souvenez-vous que l’on m’a fait rentrer en prison contrairement aux instructions strictes des spécialiste de l’hôpital Hasheminejad, en dépit des instructions du docteur Rezvani, chef du bureau des examens médicaux de l’ouest de Téhéran qui a écrit la note n° 16820 datée du 11 mai 2010 et recommandant mon transfert à l’hôpital, hors de la prison, et les recommandations répétées du bureau des examens médicaux dans des notes datées du 28 juin 2011 et du 31 juillet 2011 qui soulignent la nécessité de mon transfert à l’hôpital hors de la prison ?

Mais, contrairement à toutes ces recommandations, j’ai été renvoyé en prison.

Vous souvient-il que je vous ai dit que je n’avais pas accès à une nourriture et à une médecine appropriée, pas d’accès aux spécialistes et à un environnement calme nécessaire à ma convalescence ? Vous souvenez-vous de votre réponse ? La seule réponse que vous m’avez alors offerte était que vous ne pouvions m’accorder de permission en raison de l’opposition de l’IRGC.

Vous souvient-il que lors de nos précédentes rencontres, vous aviez indiqué que si le bureau des examens médicaux approuvait ma permission, vous me l’accorderiez ?

Vous ayant entendu, j’ai cherché et découvert que le bureau des examens médicaux avait approuvé ma sortie pour raisons médicales 3 mois avant les conversations avec votre excellence et vous avait déjà envoyé sa lettre d’approbation.

A l’époque de notre conversation, je vous ai dit que c’était la sécurité qui décidait qui et comment on recevait un traitement médical.

Monsieur le procureur,
Je ne sais pas pourquoi, mais il me semble que vous n’en savez pas beaucoup sur le bloc 350. Vous souvenez-vous que je vous avais parlé des visites en personne et que je vous avais dit que ce n’était qu’un rêves pour mes amis et moi ?

Vous souvenez-vous m’avoir répondu que le lundi précédent, moi, Hossein ROnaghi Maleki, j’avais eu droit à une visite en personne.

Vous souvenez-vous que je vous avais répondu que quiconque vous avait donné ce renseignement n’était pas votre ami, car je n’avais pas eu de visite en personne depuis 5 moins, et je n’en ai toujours pas eu à ce jour.

Vous souvenez-vous m’avoir simplement répondu « Faites une demande écrite et je l’approuverai. » ?

Votre excellence, monsieur le procureur général de Téhéran,
Vous souvenez-vous que je vous aie parlé de la nourriture honteuse de la prison, que j’aie souligné que pas même 5% des normes et régulations édictées par le bureau des prisons étaient suivies ? Vous avez répondu : « Vous vous procurez pas mal de nourriture de bonne qualité, vous mangez même des pistaches. »

Vous souvenez-vous que je vous ai expliqué les conditions sanitaires en dessous de tout au bloc 350 ? Je vous ai dit qu’il n’y avait qu’une douche et une toilette en état de marche pour 30 prisonniers ?

Je vous ai dit, puisque nous payons notre propre nourriture, payons aussi pour avoir des douches et des toilettes correctes. Vous avez répondu : « Que dirait-on si nous le permettions ? » Je me souviens très bien de ce que vous avez dit. Vous avez dit que vous vous en occuperiez vous-même. A ce jour, rien n’a changé sur ce sujet.

Mr. Dowlatabadi, souvenez-vous: vous avez dit que tous les prisonniers politiques bénéficiaient de permission et je vous ai répondu que très peu en bénéficiaient.

Vous souvenez-vous que je vous ai dit que chaque mois, 30 à 40 lettres vous étaient envoyées mais que vous ne répondiez à aucune ? Vous avez répondu : « Dans quel autre pays le procureur rencontre-t-il directement les prisonniers ? »

J’ai dit que partout dans le monde, le procureur n’était pas hors de portée, que les citoyens pouvaient librement se rendre à son bureau pour le rencontrer.

Je me souviens que vous m’avez dit : « Dans des dossiers comme le tien (accusés de crimes politiques et contre la sécurité), ce n’est pas la justice qui a le dernier mot. »

Alors bien sûr, après ces remarques, je suis étonné que vous me demandiez de vous écrire pour vous demander grâce afin que vous minimisiez le verdict.

Vous souvenez-vous de ma réponse ? Je vous ai dit que nous savions, vous et moi, que le verdict de 15 ans de prison était injuste et politique puisque la peine maximale pour ce genre de délit d’après le code pénal iranien est de six ans de prison.

Vous souvenez-vous que je vous ai dit que ma seule demande était un procès juste et non influencé par les gardes révolutionnaires et le ministère du renseignement ?

Monsieur le procureur, rappelez vous, je vous ai dit que nous étions tous les enfants de cette nation et qu’on ne devrait pas être traités comme des ennemis.

Je me souviens vous avoir dit qu’avant d’être emprisonné, j’étais accusé de calomnie et de propagande contre le système, et ce alors que nous ne voulons rien en dehors ou au-delà des lois de la république islamique.

Monsieur le procureur, j’aurais voulu que vous veniez au bloc 350 et vous rendiez compte par vous-même qu’il y a moins de 2m² par personne dans la cour. 

Je ne sais pas comment on vous a expliqué que 2 M² suffisent pour se détendre et faire du sport.

Souvenez-vous. Je vous ai dit que ce qu’on appelle des équipements de loisir ne consistent qu’en quelques haltères dans la cour, c’est le seul équipement sportif du bloc 350.

Souvenez-vous, je vous ai dit que les prisonniers politiques, en dépit de leur fort potentiel et de leur grande connaissance en matières politique, culturelle et scientifique, sont privés des équipements culturels dont disposent les condamnés pour motifs financiers ou liés à la drogue.

Souvenez-vous. Je vous ai dit que les journaux fournis aux condamnés pour motifs financiers ne l’étaient pas aux prisonniers politiques du bloc 350.

Je souhaite simplement que vous veniez au bloc 350 pour y voir de vos yeux le traitement inique que nous y recevons.

Monsieur le procureur, il était intéressant pour moi que vous me demandiez de vous fournir une lettre de garantie acceptant tous les coûts pour mes opérations, mes séjours à l’hôpital et les soins post-opératoires.

J’ai pensé, si un détenu est couvert par l’assurance de la prison, pourquoi payer tous les soins de santé ?

C’est devenu encore plus intéressant quand j’ai compris que l’hôpital Hashéminejad qui m’a facturé $14.000 pour mes opérations est couvert par l’assurance du bureau des prisons.

Que signifie vraiment une telle pression financière imposée aux familles de prisonniers pour les forcer à payer alors que l’hôpital accepte l’assurance médicale du bureau des prisons ?

Monsieur le procureur, mon silence jusqu’à ce jour n’était dû qu’à ma pudeur. J’ai essayé d’éviter d’avoir recours à l’influence des médias et de l’opinion publique pour obtenir les droits dont vous m’avez parlé.

Vos déclarations ne prouvent-elles pas que, jusqu’à présent, les méthodes habituelles sont inefficaces et n’ont aucun effet réel ? Tout ceci ne m’incite-t-il pas à changer de méthode ? Pour diverses raisons, j’espère que non.


Hossein Ronaghi Maleki
Evine bloc 350
Source: http://www.hra-news.org/685/1389-01-27-05-27-21/9279-1.html

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