La candidature officielle de Hashemi Rafsandjani a non seulement bouleversé beaucoup de positions politiques du pays, elle a aussi soulevé beaucoup de questions. Comme beaucoup de dirigeants réformateurs ont déclaré leur soutien à la candidature de Rafsandjani, on se demande ce qu’il est arrivé aux conditions mises par le dirigeant réformateur Mohammad Khatami pour participer à la course présidentielle. Qu’en est-il des demandes du peuple ? Qu’est-ce qui a conduit les réformateurs à se mettre d’accord sur Rafsandjani et qu’attendent-ils des élections ?
Hamid-Reza Djalaïpour est un membre dirigeant du Front de la Participation (Djebhe Mosharekat) ; lors d’une interview exclusive à Rooz, il a répondu à certaines de ces questions. Hier le Front a publié une déclaration qualifiant l’acte de Rafsandjani de « courageux » et lui déclarant son soutien « inconditionnel ».
Sazeman Moudjahidine Enghelab Eslami (organisation des moudjahidines de la révolution islamique), une autre organisation réformatrice a également publié une déclaration de soutien à la candidature de Rafsandjani.
Djalaïpour a révélé qu’arriver à un accord sur Rafsandjani n’a pas été facile pour les réformateurs. « C’est n’était pas une plaisanterie. Ils en ont discuté pendant des mois avant d’arriver à un accord sur un candidat qui puisse répondre aux demandes des prisonniers et du peuple. »
Voici des extraits de l’interview :
Rooz : Qu’est-ce qui a décidé les réformateurs à participer aux élections et comment ont-ils choisi Rafsandjani ?
Djalaïpour : Les élections sont importantes pour les réformateurs parce qu’elles relient les gens ordinaires aux problèmes publics et aux décisions des dirigeants. Ces élections leur sont particulièrement importantes en raison des problèmes graves auxquels l’Iran doit faire face et que les élections peuvent aider à résoudre. Les réformateurs sont dans une situation très difficile et ils ont été sujets à des interrogations sur des problèmes comme leur simple survie. Alors ils ont décidé de faire quelque chose pour sortir la société de cet état. Les réformateurs étaient d’accord sur de nombreux sujets depuis des mois ; l’un de ces sujets était l’importance des prochaines élections, un autre la nécessité d’y participer. Ils avaient aussi compris qu’ils devraient soutenir un candidat qui puisse mettre d’accord la majorité des réformateurs. Ce ne pouvait pas être n’importe qui ; il fallait qu’il soit connu et accepté de tous. Deux personnes répondaient à tous ces critères : Rafsandjani et Khatami. Khatami a insisté pour que ce soit Rafsandjani et qui lui a valu le soutien total de tous les réformateurs. Je pense que l’acceptation de Monsieur Rafsandjani est le premier succès des réformateurs qui vivent sous une pression intense depuis quatre ans. Le second sera, je l’espère, sa victoire. Je suis très optimiste parce que les groupes égocentriques de l’intérieur du pays sont maintenant très en colère, ce qui indique que les réformateurs ont fait ce qu’il fallait.
Rooz : Monsieur Khatami et les autres réformateurs ont mis des conditions particulières pour participer aux élections, comme la libéraition des prisonniers politiques, l’arrêt de l’assignation à domicile de Messieurs Moussavi et Karroubi et de Madame Zahra Rahnavard et des élections libres, et aucune de ces conditions n’a été remplie.
Djalaïpour : Les conditions posées par Monsieur Khatami étaient pour les élections, pas pour les réformateurs. Il y avait aussi des élections libre, l’accès aux médias et au public, etc…
Rooz : Aucune n’a été remplie.
Djalaïpour : Une de leurs demandes est le renforcement de la démocratie et de la volonté du peuple. Ils veulent que la démocratie soit institutionnalisée. Il y a deux façons d’y arriver : certains disent qu’il faut rester à l’écart à cause des restrictions. D’autres disent que les réformateurs devraient participer pour renforcer nos acquis. D’autres encore se tiennent en réserve. Alors, il n’a pas été facile pour les réformateurs de tomber d’accord sur ce sujet. Ils ont parlé des mois jusqu’à s’accorder de participer aux élections avec un candidat acceptable pour mettre en œuvre leurs demandes de libération des prisonniers et d’autres sujets. Ils ont compris qu’ils ne pourraient pas s’occuper de ces problèmes s’ils ne s’impliquaient pas.
Rooz : Le problème, c’est que les réformateurs ont essayé de détruire Rafsandjani dans le passé durant la sixième législature…
Djalaïpour : Ce n’est pas correct. Ceux qui soutiennent Monsieur Rafsandjani aujourd’hui ne l’avaient pas abandonné à l’époque. La liberté existait durant la période réformatrice (l’administration Khatami). Deux individus ont écrit des commentaires sévères contre Monsieur Rafsandjani et ont été emprisonnés. Rafsandjani lui-même les a tolérés. C’est l’opposition qui aujourd’hui qui monte de problème en épingle. Il faut faire attention de ne pas tomber dans leur piège. Quand lors de son mandat de huit ans Monsieur Khatami aurait-il abandonné Rafsandjani ?
Rooz : En 2005, les réformateurs ont choisi le Docteur Moïn pour affronter Monsieur Rafsandjani et de nos jours même, il se dit qu’Ahmadinejad a gagné à cause de cet acte destructeur. Son image a alors été entachée par les réformateurs qui l’ont défié en présentant leur propre candidat.
Djalaïpour : L’expérience nous a montré que nous aurions dû présenter un seul candidat, les votes réformateurs ne se seraient pas séparés. Ils ont fait une faute à l’époque et ils ont mis du temps à le comprendre.
Rooz : On parle de rejet de la candidature de Rafsandjani. D’autre disent même qu’en tant qu’homme d’état expérimenté, il devrait se cantonner au conseil de surveillance et donner son âge. Qu’en pensez-vous ?
Djalaïpour : Ceux qui ne croient pas en la force de la loi usent d’un langage menaçant pour arriver à leurs fins. Ils écrivaient ces mensonges sur lui jusqu’à 17h30 samedi (l’heure approximative de l’enregistrement de sa candidature). Monsieur Rafsandjani et les réformateurs devaient soit succomber à ces attaques, soit penser au pays et dire qu’ils en seraient. Les réformateurs ne se sont pas soumis à ces attaques et ont accepté toutes les critiques. Ces quatre dernières années leur ont été très désagréables.
Rooz : Etes-vous optimiste pour sa victoire ?
Djalaïpour : Les élections ont lieu dans 30 jours. La situation en Iran demande une analyse quotidienne. Nous devons cependant rester optimistes. Pourquoi pas ? Voyez à quoi le pays a été soumis Durant ces quatre dernières années. Il y a des gens qui vivent maintenant dans une pauvreté absolue et n’ont même plus de quoi manger. Quelque dix millions sont sous antidépresseurs et sept ou huit millions sont sur le point d’en prendre. Environ 3.7 millions sont toxicomanes, beaucoup de jeunes sont chômeurs et beaucoup sont actuellement en Europe mais veulent rentrer, même s’ils sont menacés. Regardez autour de vous, on menace les gens, on les soumet à des pressions. Nous croyons en la victoire de Monsieur Rafsandjani et qu’il mettra fin à cette situation destructrice. Il ne peut bien sûr pas faire de miracles mais la destruction cessera (en économie, politiques extérieure et intérieure°.
Il y a deux choses importantes sur Monsieur Rafasandjaini. S’il n’avait pas été là, le talibanisme aurait tout submergé dans le pays. Il a joué un rôle efficace pour faire progresser une forme modérée de l’islam. La deuxième est de savoir qui, lors des quatre années écoulées a exprimé à haute voix les problèmes du peuple ? Si je prends le parti du peuple, ça n’a aucune importance puisque je ne suis pas aux affaires. Mais quand quelqu’un a des responsabilités, cela devient important. Deux personnes ont défendu le peuple et les prisonniers : Messieurs Rafsandjani et Khatami. Il faut être raisonnable sur ces sujets et sur la situation.
Source : http://www.roozonline.com/english/news3/newsitem/archive/2013/may/16/article/consensus-on-rafsanjani-did-not-come-easily.html
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