lundi 18 octobre 2010

La situation économique et financière iranienne dans un trou d'air

La situation économique et financière en Iran entre véritablement dans un trou d'air. Aux faiblesses macroéconomiques chroniques, s'ajoutent désormais une forte instabilité du taux de change lié directement aux effets combinés des sanctions mises en places par la communauté internationale et aux manipulations délibérées des cours par le régime iranien pour reconstruire ses réservés de liquidité.

A vrai dire les observateurs s'attendaient à de telles secousses lors de l'entrée en vigueur de la réforme des subventions publiques sur les produits et les services de première nécessité. Une forte poussée inflationniste se fait déjà sentir avant même la réduction des subventions. 

Dans un article très remarqué publié par les Echos (édition datée du 11/10), il est fait référence à un rapport confidentiel pronostiquant l'effondrement de l'économie iranienne. Le quotidien affirme que selon un rapport confidentiel adressé au guide suprême, l'économie iranienne pourrait « s'effondrer d'ici à un an » en raison des sanctions occidentales si de sévères mesures ne sont pas prises.

Les Echos: Un rapport confidentiel adressé fin septembre au guide suprême du régime iranien, l'ayatollah Ali Khamenei, souligne les risques « substantiels d'un effondrement économique d'ici à moins d'un an » en raison des sanctions internationales prises pour obliger le pays à abandonner son programme nucléaire. De source généralement bien informée à Téhéran, ce rapport, auquel ont eu accès « Les Echos », rédigé par des économistes de la Banque centrale et des ministères de l'Economie et du Pétrole indique que les sanctions de l'ONU et celles ajoutées en juillet dernier par les Etats-Unis et l'Union européenne pèsent considérablement sur les secteurs du commerce, de la finance et du pétrole. Ce dernier, qui rapporte les deux tiers des recettes de l'Etat, souffre du retrait des entreprises occidentales, contraintes de choisir entre leurs intérêts aux Etats-Unis et en Iran. Alors que le français Total, l'anglo-néerlendais Shell, le norvégien Statoil et l'italien ENI ont suspendu tout investissement, peut-être suivis bientôt par le japonais Inpex, le manque de maintenance étrangère et de pièces détachées pèse sur la production de pétrole, passée de 4,2 millions de barils par jour mi-2009 à 3,5 millions cet été.

L'approvisionnement en essence (faute d'investissements dans le raffinage, Téhéran, quoique détenteur des troisièmes réserves mondiales d'or noir, doit importer le tiers de sa consommation) devient problématique. Fournissant la moitié de ces importations, Tupras, compagnie basée en Turquie, pays pourtant allié, a suspendu fin août ses opérations, après les suisses Vitol et Glencore, l'indien Reliance et le russe Lukoil. Le carburant provient désormais du Turkménistan, de la Chine, du Venezuela, ou, en contrebande, d'Irak.

Dans l'industrie, le coréen Kia et l'allemand Thyssen ont emboîté le pas fin septembre à Caterpillar, Toyota, Daimler et Hewlett-Packard en suspendant leurs activités. Allianz, Munich Ré ou Lloyds refusent désormais d'assurer des cargos et avions approvisionnant l'Iran, tandis que le financement du commerce extérieur devient très compliqué, la totalité des banques occidentales refusant tout contact avec l'Iran. Les banques des Emirats arabes unis, par où transite la moitié des importations iraniennes, ont coupé les ponts avec le pays il y a deux semaines, ce qui s'y est traduit par une pénurie de billets verts (et une brusque hausse du dollar, à 10.900 rials).

Vers des pénuries et faillites innombrables

Le régime a aussi averti samedi qu'il réprimerait les manifestations et grèves de commerçants qui suivront vraisemblablement la suppression, à partir du 23 octobre, des coûteuses (10 % du PIB) subventions à la consommation de produits alimentaires et de carburants.
Chiffrant l'impact potentiel des sanctions à plusieurs dizaines de milliards de dollars en année pleine, le rapport confidentiel recommande à l'ayatollah Khamenei, numéro un du régime devant le président Mahmoud Ahmadinejad, de prendre des « mesures drastiques pour éviter une crise grave », qui, sans paralyser le pays serait marquée par des pénuries et faillites innombrables d'ici à douze, voire huit, mois selon certains des auteurs. Il s'agirait de « reconvertir d'urgence le commerce extérieur » vers la Chine, la Russie et l'Inde, « d'augmenter les réserves en produits alimentaires et carburant » et, en dépit des obstacles techniques, de « convertir dans d'autres monnaies », par exemple en yuans, les réserves de la banque centrale placées en dollars et euros.

Par ailleurs, le régime iranien aurait pris contact avec des banques des Emirats Arabes Unis pour emprunter jusqu'à 50 milliards de dollars sur 90 jours contre le paiement de 100 millions de dollars d'intérêts. En cas de l'impossibilité pour le régime iranien de rembourser, les banques des EAU auraient la possibilité de se servir directement dans les réserves d'or iraniennes détenues à l'étranger. Le blog  à l'origine de cette information précise par ailleurs qu'environ 45% des réserves d'or de la République Islamique sont détenues dans des établissement étrangers. Cette information signifierait que le régime iranien aurait de très sérieux problèmes de liquidité pour faire tourner l'économie. 

L'achat des devises à également été réglementé ces derniers jours pour entraîner une réduction de la demande. Le dollar s’échangeait à 10,480 rials et l'euro à 14,530 rials ce lundi 18 Octobre.

Le gouvernement a annoncé hier que le versement des aides directes à la population débutera demain (19 Octobre, 27 Mehr). Ces aides devraient compenser la réduction drastique des subventions directes aux produits et services de première nécessité. 

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