jeudi 22 mai 2014

En Iran, pas de place pour « Happy » – Scott Peterson 21 mai 2014

De jeunes Iraniens qui avaient filmé une version du tube « Happy » Ont été arrêtés puis relâchés. L’ayatollah Rouhollah Khomeiny avait dit : « En Islam, pas de rigolade. »


Dans cette capture d’écran de la vidéo postée sur YouTube, les gens dansent sur le tube de Pharrell Williams sur les toits de Téhéran.

Istanbul et Téhéran

L’infraction : trop s’être amusés.

En Iran, les libertés sociales se sont souvent mesurées à la fréquence à laquelle on voyait hommes et femmes main dans la main ou jusqu’où les femmes pouvaient repousser leurs foulards. Alors, les six jeunes qui ont dansé ensemble sur les toits, cheveux au vent dans leur propre version du tube joyeux « Happy » ont pris des risques.

Il y a une génération, l’ayatollah Rouhollah Khomeiny, père de la révolution islamique de 1979, a édicté une règle sans compromis quand il a dit que Dieu « n’avait pas créé l’homme pour qu’il s’amuse… Il n’y a pas d’humour dans l’islam, pas de rigolade en islam. » 

Il n’y avait pas non plus de musique. Monsieur Khomeiny a dit à Radio Iran de se battre « de toutes ses forces » parce qu’il n’y avait « pas de différence entre la musique et l’opium. »

Les six danseurs ont été arrêtés, et, hier soir, ils ont été présentés à la télévision iranienne peu de temps après leur arrestation, dos tourné à la caméra. Le chef de la police de Téhéran, Hossein Sadjenia, a traité la vidéo de « clip vulgaire » qui « choquait la pudeur du public » et a mis en garde les Iraniens contre d’autres actes « corrompus ».

L’arrestation, qui a déclenché une tempête de critiques internationales sur les médias sociaux, suit le discours du président Hassan Rouhani ce week-end demandant plus de liberté sur internet. Aujourd’hui, alors qu’on rapporte que le groupe « Happy » a été libéré, Monsieur Rouhani a twitté un extrait d’un de ses discours de juin dernier : « Le bonheur fait partie des droits de notre peuple. Il ne faut pas être trop durs avec les conduites causées par la joie. »

Une guerre

De l’extérieur, la culture iranienne peut apparaître banale et chicaneuse.

Mais une clique d’officiels intégristes se considèrent comme les gardiens de la pureté culturelle de la république islamique et mettent en garde contre « l’invasion culturelle » de l’occident. Le tube vidéo de Pharrell Williams a produit des copy cats dans 140 pays ; il n’est pas surprenant que la version de Téhéran, vue 165.000 fois avant l’arrestation, ait fini par produire une réponse lourde.

La production d’une telle vidéo a toujours été risquée en Iran où des règles strictes régissent la façon dont les femmes doivent se couvrir la tête, interdissent de danser en public et limitent les contacts en public entre les hommes et les femmes quand ils ne sont pas mariés ensemble.

Voilà contre quoi Rouhani se bat alors qu’il tente de tenir ses promesses de campagne de plus de liberté sociale ; jusqu’à présent, les progrès ont été limités, les médias se sont un peu ouverts à la musique. « Pourquoi tremblons-nous tant ? Pourquoi nous tapissons-nous dans un coin, agrippant un bouclier et une épée de bois de peur de prendre une balle dans cette guerre culturelle ? » a-t-il dit ce week-end avant les arrestations d’  « Happy ». Même s’il y a des attaques, et il y en a, il faut y faire face par des moyens modernes, pas des méthodes passives et lâches. »

Poussez-Tirez

D’autres versions de « happy » ont été produites, en même temps qu’un nouveau phénomène sur internet : des Iraniennes postent des photos d’elles à l’extérieur, mais sans être vues, retirant leurs foulards avec joie.

Il y a deux semaines, une manifestation a eu lieu à Téhéran contre la campagne anti-foulard et l’assouplissement des normes de pudeur alors que les températures du printemps grimpent. Les manifestants intégristes, dont des femmes portant de longs tchadors noirs, se plaignaient que ces femmes étaient « mal-voilées. »

L’arrestation du groupe « Happy » pourrait se retourner contre le régime, suscitant la ridiculisation des règles, comme les tristes versions anonymes postées de « Happy » respectant strictement les règles de l’islam sur la couverture du corps.

Lors de la diffusion télévisée, les six se tenaient tête basse comme s’ils étaient obligés d’avouer ; ils ont dit qu’on les avait poussés par ruse à faire la vidéo, alléguant qu’ils pensaient participer à une audition.

Le chef de la police de Téhéran s’est vanté d’avoir identifié les six en deux heures quand il a reçu l’ordre de les arrêter, leurs noms apparaissaient en clair sur la vidéo, et de les avoir cueillis en six heures. Personne n’a mentionné le fait que la vidéo avait été postée depuis plusieurs semaines.

Le site d’information IranWire a cité une source : « Tous les jeunes producteurs ont reçu des appels téléphoniques pour les informer qu’un de leurs amis avait eu un accident de voiture et avait besoin de leur aide. Quand ils sont arrivés à l’adresse donnée au téléphone, les forces de sécurité les attendaient pour les arrêter. »

Cette source a dit hier à IranWire qu’ils seraient libérés aujourd’hui contre une caution de $10.000 et l’engagement de ne pas parler aux médias.

Source : http://www.csmonitor.com/World/Middle-East/2014/0521/.U3z41ovfMog.twitter

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire