Le message est clair et concis : le gouvernement n’a aucune autorité, nous avons le dernier mot et nous ne permettrons pas aux Iraniens qui ont quitté le pays, qui ont la double nationalité et qui résident à l’étranger de rentrer au pays pour y commencer une nouvelle vie.
Voici le message envoyé de temps à autre par un centre politique spécifique en se contentant de changer les mots. La cible est claire : le gouvernement et tous ceux qui attendent des réformes et du changement.
Ce message a été diffusé explicitement deux fois la semaine dernière à ceux qui nourrissaient quelque espoir, surtout les militants politiques et sociaux : attention, arrêtez de vous préparer à rentrer en Iran pour y vivre ou même pour y rendre visite à vos familles.
Le premier message a été envoyé par le procureur général Mohseni Edjehi lors d’une conférence de presse ; il y a dévoilé en 2013 la création d’un tribunal spécial siégeant à huis clos, chargé de juger par contumace les personnes ayant joué un rôle dans les manifestations qui ont suivi l’élection présidentielle de 2009.
Lundi, Hossein Nouraninejad a été arrêté à son domicile et envoyé en prison dans une section sous la supervision des gardes révolutionnaires ; ce n’est que le prolongement du message d’Edjehi. Nouraninejad est un militant politique proche des réformateurs et du parti Mosharekat (Participation Islamique) ; il avait été arrêté et emprisonné en relation avec le Mouvement Vert mais avait quitté le pays pour s’établir en Australie pour y poursuivre ses études.
C’est la naissance de son premier enfant qui l’a fait revenir au pays pour y voir son nouveau-né et son épouse, une journaliste, Parastou Sarmadi. Elle a déclaré que des agents étaient venus chez eux et y avaient arrêté son époux ; ils lui avaient dit qu’ils l’emmenaient à la section 1 d’Evine.
C’est de la même façon que Sadjadeh Arabsorkhi et Serajeddine Mirdamadi ont été arrêtés, interrogés et condamnés à leur retour en Iran, après l’élection de Rouhani l’année dernière.
Le président Rouhani et plusieurs membres importants de son cabinet ont, à plusieurs reprises ces derniers mois, invité leurs compatriotes iraniens vivant à l’étranger à retourner chez eux. Durant son voyage de 2009 à New York, Rouhani a délivré le même message à des Iraniens lors d’un dîner.
Suite à quoi, le secrétaire d’état aux affaires consulaires a précisé qu’il n’existait pas de loi en Iran interdisant aux Iraniens de rentrer au pays. Mais il a aussi dit que la peur des Iraniens qui voulaient rentrer n’avait d’autre base que la propagande des groupes d’opposition.
Pour répondre sur le statut des Iraniens qui avaient quitté le pays ces quatre dernières années, il a répondu que le président avait ordonné la création d’une commission interministérielle pour examiner le retour des Iraniens, surtout de ceux qui ne faisaient l’objet d’aucune poursuite.
Avec le temps, il est devenu clair que certains individus, au sein du régime, sous le contrôle de la justice, n’acceptaient pas cette politique du gouvernement et ne voulaient pas permettre au président de créer des conditions propices au retour des Iraniens, surtout des militants politiques et des journalistes.
C’est le même groupe qui harcèle les familles des militants iraniens émigrés à cause des menaces et de la peur d’être arrêtés et emprisonnés, moyen de forcer les militants d’arrêter leurs actions militantes et médiatiques. Ils envoient souvent des messages, tant directs qu’indirects, qui sont quelquefois menaçants, aux journalistes qui ont une double nationalité et qui travaillaient pour des médias officiels et légaux avant l’élection présidentielle de 2013, pour les persuader d’arrêter de travailler.
Les évènements récents corroborent l’observation qu’au fil du temps, ceux qui sont opposés au retour des Iraniens dans leur patrie l’emportent sur le cabinet Rouhani qui lui, le favorise.
Durant les six derniers mois, des personnes qui se sont rendues au bureau des passeports, à celui du procureur ou à la prison d’Evine ont raconté à leurs proches qu’ils avaient été témoins de l’emprisonnement et de la détention sans motif de beaucoup d’Iraniens qui étaient rentrés au pays. Ils ont vu de jeunes Iraniens sillonnant le bureau des passeports pour comprendre les raisons de leur interdiction de sortie du territoire ou pour récupérer leurs passeports confisqués à l’aéroport à leur retour en Iran. Ces personnes ont dû se rendre au ministère du renseignement, à l’agence du renseignement des gardes révolutionnaires ou au bureau du procureur.
Je pense que le second message envoyé aux Iraniens voulant rentrer au pays, ce sont les évènements de la section 350 de la prison d’Evine qui ont attiré l’attention du monde entier. Le message était clair : s’ils rentraient, les Iraniens subiraient le même traitement : tabassage à mort, blessures, etc.
Ceux qui ont perpétré cette violence contre les détenus d’Evine ont nié leurs crimes mais le tumulte engendré a poussé à la démission du directeur de la prison. Mais il a bénéficié d’avancement, ce qui est un camouflet pour les personnes et les groupes qui défendent les droits humains et qui suivent la situation en Iran, comme le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-Moon et le rapporteur spécial aux droits humains Shahid.
Ces violations grossières et épouvantables des droits humains se passent en Iran alors que ce pays s’est engagé à défendre les droits humains.
Il faut souligner que l’une des faiblesses du cabinet Rouhani a été de ne pas prendre position sur la mise en place de la déclaration universelle des droits humains. On rapporte désormais que les efforts du président pour codifier mes « droits du citoyen » rencontrent aussi de sérieux obstacles en dépit de ses lacunes. Il est maintenant possible que ce projet de loi soit complètement écarté par le parlement.
Si Rouhani ne réussit pas à tenir ses promesses de campagne et à répondre aux demandes de ceux qui ont voté pour lui, la majorité des Iraniens en arriveraient à la conclusion que le transfert de pouvoir par le processus électoral ne produit aucun changement pour eux, ce qui enlèverait toute chance à Rouhani d’être réélu, mais permettrait aussi à ceux qui s’opposent aux programmes et réformes de son cabinet d’écraser les appels des réformateurs qui suivent Seyed Mohammad Khatami et Hashemi Rafsandjani.
Source : http://www.roozonline.com/english/news3/newsitem/archive/2014/april/28/article/clear-message-do-not-return-to-iran.html
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