Farzad Kamangar est un enseignant qui a travaillé dans les zones déshéritées du Kurdistan. Il milite pour les droits humains et l’environnement. Il a été arrêté, torturé et condamné à mort lors d’un procès qui a duré moins de trois minutes.
Version anglaise de cette lettre
11 Mars 2010
Les anges qui rient le lundi
Les anges qui rient le lundi
J’écoutais la berceuse de mon camarade de cellule, il chantait pour ses filles Parya et Zahra. Cette berceuse mélancolique était suivie des sanglots d’un autre camarade de cellule, et moi aussi j’éclatais en sanglots. C’est la deuxième fois qu’il est arrêté. La première fois, il avait été condamné à un an de prison et cette fois il va devoir y rester 10 ans. Toute sa joie et son excitation venaient de la visite prévue de ses enfants lundi.
Le jour de la visite, les enfants, sans s’occuper des gens qui les entouraient, devant les yeux de leurs parents, au milieu des sièges de la salle de visite, sautaient partout et marchaient sur les mains pour montrer à leur père leurs progrès en athlétisme.
Le père, fier de ses enfants, souriait. La mère à l’expression innocente, essayait de nier ses peines, sa solitude et ses espoirs. Elle regardait son mari avec joie et l’excitation de ses enfants avec amour.
Eloigné du milieu scolaire depuis des mois, je n’arrêtais pas de regarder Parya et Zahra ; j’en parlerai à ma mère. L’un des moments les plus forts gravés dans mon esprit est ce moment que cette famille a passé réunie.
On aurait dit qu’ils étaient dans le vide, dans les cieux, dans un endroit hors du monde, sans environnement. Ils n’avaient que compassion les uns pour les autres. Ils ne faisaient pas attention aux gardes, aux murs, aux autres prisonniers, ils partageaient leurs sourires. J’espère toujours voir Parya et Zahra en dehors de la prison, j’aurais voulu qu’elles restent une demi-heure de plus. Alors qu’elles disaient au revoir, j’ai essayé de ne pas les regarder pour que ce moment spectaculaire de leur réunion soit gravé à jamais dans mon esprit. Ces belles fillettes se moquaient du monde factice qui entourait leur père par chacun de leurs mouvements et de leurs sauts.
On aurait dit qu’ils étaient dans le vide, dans les cieux, dans un endroit hors du monde, sans environnement. Ils n’avaient que compassion les uns pour les autres. Ils ne faisaient pas attention aux gardes, aux murs, aux autres prisonniers, ils partageaient leurs sourires. J’espère toujours voir Parya et Zahra en dehors de la prison, j’aurais voulu qu’elles restent une demi-heure de plus. Alors qu’elles disaient au revoir, j’ai essayé de ne pas les regarder pour que ce moment spectaculaire de leur réunion soit gravé à jamais dans mon esprit. Ces belles fillettes se moquaient du monde factice qui entourait leur père par chacun de leurs mouvements et de leurs sauts.
Le destin d’enfants comme Zahra et Parya, c’est l’histoire de notre époque. Cela fait des années qu’elle s’écrit et, chaque jour, d’autres Zahra et Parya rendent visite à leur père. Ou bien une enfant comme Ava s’assoit près de la table des Haft-Sin (décoration sur une table traditionnelle du nouvel an iranien) et chante à son poisson rouge : « Cette année, papa est en prison ! »
J’ai vu Parya et Zahra sur le point de partir, tenant encore la main de leur père. Elles marchaient vers la sortie, le sourire aux lèvres, comme si elles partaient pour la fête foraine.
Moi aussi je voulais leur tenir la main et partager leur joie. Avant que le père ne dise au revoir, je détournais les yeux pour ne pas voir ses yeux pleins de larmes. Et là, j’ai vu ma mère, les yeux pleins de larmes se préparant à se séparer de son fils. En embrassant ma mère, j’ai imité Parya et Zahra.
Quand Parya et Zahra nous rendaient visite, je ne pouvais plus détourner le regard. Les deux anges me faisaient signe de la main. Ce sont des anges, sauf qu’elles n’ont pas d’ailes.
Farzad Kamangar
Prison d’Evine
10 mars 2010
Prison d’Evine
10 mars 2010
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