mardi 30 novembre 2010

Réza Khandan à propos de la seconde audience de son épouse Nasrine Sotoudeh : « Un acquittement est hautement improbable »

Dimanche 28 novembre 2010 – Réza Khandan, l’époux de Nasrine Sotoudeh, a informé la Campagne Internationale pour les Droits Humains en Iran, qu’à son avis, et en raison du peu d’attention que le juge Pir-Abbassi a prêté aux preuves versées au dossier par son épouse et ses avocats durant la seconde audience qui a duré plus de 5 heures, il était hautement improbable qu’elle soit acquittée.

Déclaration de Réza Khandan rapportée par la Campagne Internationale pour les Droits Humains en Iran : « Les audiences n’ont pas été très prometteuse. Chaque partie est restée sur ses positions. C’était presque comme si le juge et le procureur vivaient dans un monde différent de celui de Madame Sotoudeh et de ses avocats. Les deux parties ont parlé mais n’ont pas tenté de comprendre le point de vue de la partie opposée. L’atmosphère était très peu coopérative et si l’on prend en compte tout ce que mon épouse a du traverser jusqu’à présent, je n’ai pas beaucoup d’espoir qu’elle obtienne un acquittement. Actuellement, mon seul espoir est qu’on lui accorde la liberté sous caution pour qu’elle puisse rentrer à la mais et récupérer physiquement en attendant le verdict. »

La seconde audience de Nasrine Sotoudeh, avocate et militante des droits humains, a eu lieu le dimanche 28 novembre 2010 à la 26ème chambre du tribunal révolutionnaire présidé par le juge Pir-Abassi et en présence des quatre avocats de Nasrine Sotoudeh. Réza Khandan, époux de Nasrine Sotoudeh, des représentants du Barreau iranien et du syndicat national des avocats étaient également présent à l’audience qui a duré 5 heures. Pir-Abassi, le juge qui s’occupe du dossier, doit rendre son verdict et décider si Nasrine Sotoudeh doit rester en détention la semaine dernière.

Réza Khandan a décrit l’état physique de Nasrine Sotoudeh comme bien meilleur que la semaine dernière quand elle était en grève de la faim : « Les avocats de Nasrin ont tout tenté pour obtenir la liberté sous caution, mais malheureusement, rien n’a été décidé aujourd’hui. Ils ont aussi demandé que Nasrine soit sortie de sa cellule à l’isolement, mais le juge n’a pas été convaincu par les arguments qu’ils ont présentés et Nasrine est donc retournée à l’isolement après l’audience. »

« Les accusations étaient plus ou moins les mêmes que celles présentées à la première audience. Ils y ont ajouté l’adhésion au Centre des Avocats pour la Défense lors des interrogatoires. Ses avocats ont objecté aujourd’hui que d’après la loi, cette adhésion n’était pas un crime et que Nasrine n’en avait jamais été membre. En général, le dossier de Nasrine est très complet cette fois-ci et inclut toutes ses interviews et ses commentaires à la presse ainsi que des interviews avec des enfants et des femmes. »

« Ils m’ont permis d’entrer dans la salle 45 minutes après le début de l’audience. Quand je suis entré, Nasrine était en train de prononcer ses derniers mots. Elle se plaignait de la façon dont elle a été traitée en prison et expliquait que le plus dur lors de son incarcération était l’isolement. Nasrine a aussi demandé que des sanctions disciplinaires soient prises à l’encontre d’un des fonctionnaires qui l’avait insultée. Nasrine s’était également plainte lors de l’incident, mais il n’y a aucune trace écrite de sa plainte dans son dossier. Nous ne savons pas comment procéder sur le sujet. »

Khandan a déclaré qu’en dépit de la plaidoirie très complète de Mohammad Ali Soltani, un des quatre avocats de Nasrine Sotoudeh, ils ne croyaient pas à la probabilité de son acquittement. « Vu la façon dont son dossier a été traité depuis le début, je doute qu’elle soit acquittée. Mon seul espoir actuellement c’est qu’on la libère sous caution pour qu’elle puisse rentrer à la maison et se remettre physiquement en attendant le verdict. »

Nasrin Sotoudeh, avocate et militante des droits humains, a été arrêtée début septembre et mise à l’isolement. Elle était soit en grève de la faim ou de la soif pendant la plus grande partie de son incarcération.


Les militants étudiants iraniens appellent à une grève nationale des universités pour commémorer la Journée des Etudiants, le 16 Azar

Samedi 20 novembre 2010 – A l’approche de la Journée des Etudiants, le 7 décembre (16 Azar), un groupe d’étudiants a publié une déclaration appelant à une grève nationale de trois jours les 6, 7 et 8 décembre 2010 (15, 16 et 17 Azar)

D’après Jaras, les étudiants déclarent: « Au cours de l’année dernière, nous avons été témoins des manifestations de rue au cours desquelles nos concitoyens ont été massacrés, du scandale de la prison de Kahrizak, de l’attaque brutale de la cité universitaire de l’université de Téhéran, des aveux forcés des militants en prison, de l’arrestation et de l’emprisonnement de milliers d’innocents, d’exécutions sans discernement et de milliers d’autres agissements illégaux, violant tous les lois de notre nation. » Ils appellent toutes les organisations et associations étudiantes à participer à une grève nationale étudiante pour s’assurer que leur cri pour la liberté soit entendu des oppresseurs et de ceux épris de liberté de par le monde.

« Nous demandons à tous ceux qui lisent cette déclaration de nous aider à faire circuler l’information par les sites web, les blogs et les réseaux sociaux, à l’intérieur des universités et les cités universitaires. »

Les militants de nombreuses universités de Téhéran ont également déclaré que les détails à propos de la grève seront donnés ultérieurement. Il faut mentionner qu’à l’approche de la Journée de l’Etudiant (16 Azar), nombre de militants à l’intérieur comme à l’extérieur de l’Iran ont également publié des déclarations appelant tous les étudiants iraniens du monde à organiser simultanément des commémorations pour la Journée Nationale des Etudiants.

Source: Jaras http://www.rahesabz.net/story/27625/

Le Viol en Iran - Kate Allen

« Le viol n’est pas un coup porté à une personne mais à toute une famille. Une victime de viol ne guérit jamais au fil du temps qui passe. A chaque regard du père, les blessures se rouvrent. » Bahareh Maghami victime de viol en Iran, Avril 2010

Répercutant les rapports des groupes de droits humains, les médias britanniques se sont récemment fait l’écho du cas d’une jeune femme d’Iran, « Leyla » qui a été enlevée, détenue et violée par les forces de sécurité de ce pays parce que son fiancé était impliqué dans les manifestations qui ont suivi les élections présidentielles controversées de l’année dernière.

C’est une histoire terrible et malheureusement pas unique. Suite aux manifestations post-électorales, les autorités iraniennes ont réprimé avec une incroyable sévérité quiconque ressenti comme impliqué dans la critique du statu quo. Des milliers de personnes ont été arrêtées, les étudiants, les avocats, les journalistes, les syndicalistes et les militants des droits humains étaient plus principalement visés. Des centaines de personnes ont ensuite été jugées de façon inéquitable lors de « procès mis en scène » de masse et certains ont été exécutés. Mais au fur à mesure des libérations, les détails des maltraitances, y compris de viol d’hommes et de femmes, revenaient de plus en plus souvent.

Les autorités iraniennes reconnaissent quelques maltraitance au centre de détention de Kharizak, dont les anciens détenus sont sortis avec des histoires de viol, de torture et d’une situation atterrante qui a conduit a au moins trois morts, mais en dehors de ça, la réaction du gouvernement iranien a été de réfuter et de réprimer toutes les autres allégations de maltraitance.

Ebrahim Sharifi, étudiant de Téhéran de 24 ans, a été arrêté par des fonctionnaires de la sécurité en civil en juin 2009 et été mis à l’isolement pendant une semaine avant d’être relâché. Il a dit à Amnesty avoir été attaché, les yeux bandés et battu avant d’être violé. Il a aussi été soumis à des séries de coups et à des simulacres d’exécution.

Quand il a tenté de porter plainte, les agents du renseignement l’auraient menacé ainsi que sa famille. Le juge en charge du dossier lui a dit : « Peut-être vous a-t-on payé…si vous persistez dans votre plainte, vous le paierez certainement en enfer. » La commission d’enquête judiciaire a déclaré que ses allégations de viol étaient fabriquées de toutes pièces et avaient des motifs politiques.

Deux anciens membres de la milice bassidj soutenue par le gouvernement et vivant désormais au Royaume Uni ont dit aux médias britanniques qu’ils ont été témoins de viols systématiques d’hommes et même de jeunes hommes dans un parc de la ville méridionale de Shiraz. D’autres membres de la bassidj ont poussés des jeunes hommes et même de jeunes garçons dans des conteneurs maritimes dans le parc où les viols avaient lieu. Ils se sont plaints tous les deux à leurs supérieurs ce qui les a conduit à être obligés de quitter l’Iran.

Les détenues relatent fréquemment des insultes sexuelles et des menaces de viol. Zahra Kamali, étudiante arrêtée en juillet 2009, a raconté à Amnesty International que ceux qui l’interrogeaient l’avaient accusé de vouloir coucher avec d’autres hommes et avaient tripoté sa poitrine. Elle a dit que sa codétenue d’alors, une militante féministe, avait été encore plus maltraitée. « Elle nous a dit qu’on lui avait fixé des câbles électriques sur les mamelons et donner des chocs électriques. Elle allait si mal qu’elle s’évanouissait parfois dans la cellule. »

Ce sont les femmes qui sont le plus discriminées par la loi iranienne ; le témoignage d’une femme au tribunal par exemple ne vaut que la moitié de celui d’un homme. Ceux qui font campagne pour les droits des femmes continuent à être harcelés, intimidés et arrêtés. Amnesty fait campagne pour Ronak Safazadeh, qui a fait campagne pour les droits des femmes, emprisonnée en 2009 pour 5 ans sur des accusations qui semblent forgées de toutes pièces.

Tous les viols sont de graves violations des droits humains. Mais la violation a encore plus de sens quand le violeur est un fonctionnaire. Le rapporteur spécial de l’ONU sur la torture affirme que le viol est une torture quand il est perpétré par des fonctionnaires ou à leur instigation. Les organismes internationaux et régionaux de défense des droits humains ont entériné le fait que le viol par des fonctionnaires est toujours une torture et ne peut être considéré comme un simple acte criminel.

L’usage du viol comme forme de torture (ou comme une arme de guerre) ne se limite certainement pas à l’Iran. Mais ça ne veut pas dire que ces rapports puissent être ignorés. Une enquête international sur les droits humains en Iran a été refusée par le gouvernement : il n’a pas donné son autorisation d’entrée à 8 rapporteurs des droits humains de l’ONU et il utilise les réunions de l’ONU pour réfuté les rapports sur les violations des droits humains.

La situation des droits humains en Iran est devenue si terrible qu’Amnesty International, Human Rights Watch et d’autres organisations en ont appelé la semaine dernière au Secrétaire Général de l’ONU pour qu’il nomme un émissaire spécial pour enquêter et faire un rapport plus détaillé sur la situation des droits humains en Iran.

Tout ceci n’améliorera pas beaucoup la situation de ceux mentionnés dans cet article comme Leyla, Ebrahim et Zahra. Mais la communauté internationale doit s’assurer, pour eux et pour d’autres innombrables Iraniens, qu’on ne se concentra pas uniquement sur les plans nucléaires de l’Iran mais aussi sur les droits humains de son peuple.

Kate Allen, Directrice d’Amnesty International pour le Royaume Uni

Source: http://www.telegraph.co.uk/news/worldnews/middleeast/iran/8102358/Rape-in-Irans-prisons-the-cruellest-torture.html

samedi 27 novembre 2010

Lettre de Mohammad Mostafaï A son Excellence Le Secrétaire des Nations Unies, Monsieur Ban Ki-Moon,

Au Nom de Dieu,

Respect et salutations.

Comme vous le savez, et il en existe de nombreuses preuves, la situation actuelle de la société, de la justice et de la politique en république islamique d’Iran, est telle que les citoyens iraniens sont contraints de quitter leur patrie par tous les moyens, légaux ou illégaux. Les forces sécuritaires et judiciaires arrêtent et torturent, aux cötéss du gouvernement, les Iraniens en raison de leurs tendances religieuses, sociales et politiques ; les Iraniens en ont peur, c’est ce qui cause cet exode. Les citoyens iraniens cherchant un refuge dans d’autres pays ne peuvent plus rentrer dans leur patrie. Un rapatriement de force les exposerait à être arrêtés, physiquement châtiés, ils ne jouiraient plus d’aucune sécurité ni d’aucune liberté et leur dignité serait piétinée.
Actuellement, un grand nombre de demandeurs d’asile iraniens répartis dans différents pays dont la Turquie et la Grèce, attendent des nouvelles du Haut Commissariat aux Réfugiés de l’ONU et des gouvernements qui se sont engagés à accepter des demandeurs d’asile. Malheureusement, jusqu’à ce jour, les demandeurs d’asile n’ont pas pu bénéficier des droits des réfugiés reconnus par les règles et traités internationaux.
En raison de la situation actuelle dans la république islamique d’Iran et surtout depuis les évènements qui ont suivis les élections présidentielles, les militants politiques et civiques ne connaissent que l’insécurité et les citoyens ordinaires sont également en danger. Tous les Iraniens sont privés du droit à une vie dans un environnement sûr sous la pression du gouvernement ; tous les membres des Nations Unies doivent donc accueillir et accepter les demandeurs d’asile. Cependant et nous en sommes consternés, dans la plupart des cas, l’acceptation dure des années sans considération pour le fait qu’ils y aient droit tandis que d’autres se voient refuser ce droit tout de go.
Et tout ceci alors que le droit de vivre en sécurité, sans torture et humiliation et le droit de choisir librement sa résidence font partie des libertés accordées à chacun par la Déclaration Universelle des Droits Humains. Selon le protocole des réfugiés ratifié le 31 janvier 1967 et l’accord international en 1966, les institutions comme le Haut Commissariat aux Réfugiés de l’ONU sont supervisés par les Nations Unies qui sont directement responsable de la mise en application des règles et traités internationaux et doivent s’assurer que la sécurité, la dignité et les droits humains fondamentaux des demandeurs d’asile soient respectés.
Je demande donc aux Nations Unies de contacter ses états membres de toute urgence à propos des demandeurs d’asile ; il y a des Iraniens dans plusieurs pays vivant dans des conditions déplorables et qui ont besoin de soutien dans leur demande d’asile. Les réfugiés pourront alors se rendre dans les états où ils désirent vivre en sécurité. La prolongation des procédures pour les réfugiés est évidemment contraire aux normes des droits humains et doit être considérée comme une torture et un châtiment.

Respectueusement, 

Mohammad Mostafaï
Avocat et militant des droits humains

Source : http://persian2english.com/?p=16862

Vers 16 Azar (7 Décembre), Journée des Etudiants en IRAN

Célébrons les étudiants iraniens le 7 Décembre (16 Azar). Leur courage et leur détermination ont transformé l'Iran à jamais. "L'Université est vivante". Plus que jamais.   

Semaine 47 pour un Iran Libre et Démocratique

  • Nouvelles des Prisonniers
A-Transferts
  • Payman Karimi, battu par le personnel médical d’Evine puis transféré à l’isolement au 240.
  • Hengameh Shahidi, journaliste, transférée à l’infirmerie suite à sa grève de la faim.
  • Ahmad Tamouyi, prisonnier politique kurde purgeant une peine de 15 ans, transféré à l’isolement.
B- Arrestations/Incarcérations
  • Siavash Hatami, militant étudiant arrêté lors d’un examen à l’université Beheshti ; il était libre sous caution. Son domicile a été perquisitionné et ses ordinateurs confisqués.
  • Morteza Komsari, syndicaliste des bus de Téhéran arrêté aujourd’hui au tribunal où il avait été convoqué.
  • On est toujours sans nouvelles des 2 militants kurdes Behrooz Ladjevard & Firouz Maleki arrêtés il y a trois semaines à Salmaz.
  • Mohammad Nikzad, étudiant en philosophie de l’université Allameh, de retour à Evine pour y purger sa peine. Il avait été arrêté l’année dernière et a déjà séjourné au bloc 209; il est condamné à un an dont 9 mois avec sursis.
  • Arash Sadeghi est de retour à Evine. Il n’est pas réapparu depuis sa convocation de lundi.
  • 22 personnes arrêtées à Karadj dans le cadre de Goldquest.
  • 60 personnes accusées d’opérer des sites pornographiques arrêtées.
  • 97 militants arrêtés pendant le mois d’Aban.
  • 3 bahaïs arrêtés pour leur travail humanitaire entament leur 4ème année de prison.
  • 9 hommes et 11 femmes arrêtés à Mahabad lors d’une fête.
  • 13 hommes et 3 femmes arrêtés à Torghabeh-Shandiz lors d’une fête.
  • 17 étudiants arrêtés lors d’une fête à Téhéran.
  • En une semaine plus de 50 arrestations pour des participants  à des fêtes.
  • Plusieurs chrétiens arrêtés à Hamedan.
  • 2 hommes ayant de la famille à Ashraf ont été arrêtés.
  • L’ancien secrétaire de l’association islamique des étudiants d’Hamedan arrêté.
  • 3 Bahaïs d’Ispahan commencent à purger leur peine de prison.
C- Libérations
  • Biglerbiguy & Ramat Azizi, 2 militants du Mazandaran libérés sous caution.
  • Homayoun Djabéri, syndicaliste des bus de Téhéran libéré sous une caution de 30 millions Radjaï Shahr.
  • Après un an de prison, Mehdi Eghbal, membre du front de Participation, a été libéré sous caution pour 48 heures uniquement la semaine dernière.
  • Le vétéran de la guerre Hossein Farzin libéré de la prison de Mashhad sous une caution de 30.000USD.
  • Rashin MirSaid & Mahsa Rahmati deux manifestantes graciées par le guide suprême.
  • Hamid Mohseni, responsable de la campagne de Moussavi libéré d’Evine sous caution mardi matin.
  • Roya Yazdani, bahaï est libérée lundi.
  • Les membres d’un gang de trafic international de drogue relâchés peu de temps après leur arrestation en raison de leurs liens avec le ministère du renseignement.
  • 2 Bahaïs libérés de la prison de Yassoudj.
  • 19 prisonniers politiques libérés d’Evine 350 pour la fête religieuse Eid Qadr : Sina Golchin, Nasser Abdolhosseini, Reza Khademi, Iman Azarian, Massoud Babapour, Djavad Maherzadeh, Golchin Arefi, Saman Nouranian, Abbas Kakaei, Alireza Moradi & Aptin Ghafari
D-Autres Nouvelles 
  • Premier appel téléphonique pour Zeinab Bahreini.
  • Mohammad Davari, journaliste emprisonné pour avoir révélé les viols de Kahrizak, honoré par le CPJ.
  • Ardjang Davoudi, prisonnier politique, interrogé et menacé par le ministère du renseignement.
  • Après deux semaines sans nouvelles, Ali Gholizadeh contacte sa famille ; il est au bloc 209 d’Evine à l’isolement.
  • Reza Djoshan est à l’isolement et sous la torture depuis 8 mois.
  • Le blogger Khorramdin a eu droit à 4 visites pour 49 semaines de détention dont 11 mois à l’isolement. Il est condamné à 15 ans de prison. Son avocate Sarah Sabaghian a été arrêtée le week-end dernier.
  • La journaliste Nazanin Khosrovani interdite de visites.
  • Leïla, prisonnière de droit commun de la prison de Radjaï-Shahr se suicide.
  • Akram Neghabi & Jila Mahdavian, deux mères en deuil, sont toujours à l’isolement à Evine.
  • J. Reza, S. Ghazizadeh, F. Jafari & J. Farajion en grève de la faim à la prison de Saqqez.
  • Plus aucun journal à Radjaï-Shahr
  • Le père du juge en charge du procès de Kahrizak kidnappé puis relâché devant la maison de son fils.
Procès, condamnations, exécutions
  • Amir Ahmad Monazami, étudiant de l’université Azad, condamné à un an de prison et 74 coups de fouet. Il avait été arrêté lors des cérémonies pour l’ayatollah Montazéri, a été incarcéré un mois au bloc 209 d’Evine et est actuellement libre sous caution.
  • Peine de mort confirmée pour Djafar Kazemi & Mohammad-Ali Hadj-Aghaie.
  • La journaliste Zeynab Kazemkhah condamnée à 4 mois de prison et 5 ans avec sursis.
  • Hamid-Reza Khadem, du front national, a été jugé mardi; le verdict sera connu dans 2 semaines.
  • 3 syndicalistes de Haft-Tapeh condamnés à de la prison pour insultes à Khamenei: Behrouz Nikoufard, Alireza Saïdi + Behrouz Molazadeh.
  • Mahmoud N., 24 ans, exécuté à l’intérieur de la prison de Kachan pour possession de 500g. de crack. 
  • Un mandat d’arrêt a été émis contre le fils de Rafsandjani.
  • Le dossier d’Hossein Ronaghi transféré en cour d’appel. Il est condamné à 15 ans de prison et est à l’isolement depuis 11 mois.
  • 2 femmes condamnées à mort pour le meurtre de leur mari.
  • Le responsable de la justice d’Azarbaïdjan confirme que la condamnation de Sakineh à la lapidation est confirmée en appel et sera exécutée.
  • Eyghan Shahidi, arrêté à Kermanshah le printemps dernier et actuellement libre sous caution est convoqué au tribunal d’Evine.
  • Un meurtrier va être exécuté sur une place publique de Téhéran.
  • 2 rebelles kurdes tués 
  • Le régime veut tuer 98 autres personnes.
  • Condamnation de 30 derviches de Charmahin (province d’Ispahan) à un an avec sursis + une amende.
  • Le procès des randonneurs américains se tiendra le 6 février.
  • Encore une main amputée lundi devant les détenus de la prison de Mashhad pour un vol.
  • Les forces de sécurité tuent un jeune homme et en blessent deux autres au Baloutchistan mardi.
  • 3 ans de prison pour une femme n’ayant pas respecté le code vestimentaire islamique.
  • Un colporteur kurde abattu à la frontière.
Les persécutions contre les universités
  • Siyamak Amin, étudiant de gauche, expulsé de l’université d’Oroumieh.
  • Annonce/démenti : les universités Allameh et Khazeh Nazir devraient puis ne devraient pas être délocalisées hors de Téhéran.
L’économie de l’Iran
  • Un ouvrier d’Iran Khodro se suicide après son licenciement.
  • Les banques ne verseront pas de subventions aux familles des prisonniers politiques.
  • La production à l’usine de tuyaux du Khouzestan est arrêtée depuis 7 mois faute de matériaux.La Malaisie ouvre 11 magasins en Iran.
  • Les propriétaires de boutiques de Téhéran doivent afficher un panneau interdisant l’entrée aux femmes mal voilées.
  • Les Iraniens ont déposé 2.9 milliards de dollars dans des banques turques. 
  • 3 ateliers de Bahaï incendiés à Ispahan.
Les manifestations
  • Des centaines d’ouvriers du bâtiment manifestent lundi devant le parlement.
L’Iran à l’étranger
  • BH Levy écrit un nouvel article sur Sakineh.
  • Sarkozy déclare au sommet de l’Otan que la vraie menace, c’est l’Iran.
  • Bild am Sonntag demande la libération de ses journalistes.
  • Des réfugiés iraniens en Turquie attaqués par les agents du régime.
  • Le club américain de la presse demande la libération de tous les journalistes iraniens emprisonnés.
  • La Gambie coupe toutes ses relations diplomatiques avec l’Iran après la découverte d’armes.
  • L’avocat Mostafaï écrit à Ban-Ki-Moon pour les réfugiés politiques iraniens.
  • Mort tragique de 4 demandeurs d’asile en Grèce.
  • La Première Dame du Canada se bat pour les droits des femmes en Iran.
  • Une lettre envoyée à Ban-Ki-Moon pour lui demander d’intercéder pour la libération d’Ebrahim Yazdi. 
  • Le prix IDFA donné aux cinéastes amateurs qui ont filmé les évènements post-électoraux l’année dernière en Iran.
  • Le Nigéria inculpe un garde iranien dans l’affaire du trafic d’armes Azim Aghajani.
  • Mahboubeh Abbasgholizadeh recevra le prix Johann Philipp pour la liberté d’expression de la presse en Allemagne le 5 décembre.
  • Le Nigeria intercepte un autre chargement d’armes en provenance d’Iran.
La politique en Iran
  • L’accès au domicile de Mehdi Karroubi est de nouveau interdit.
  • 5 vice-ministres auraient démissionné.
  • Le ministre de la justice déclare qu’il y aurait 200.000 prisonniers pour 85.000 places.
  • Le député Naderan confirme devant un tribunal que le doctorat du vice-président Rahimi est faux.
  • Les forces de sécurité empêchent Moussavi d’assister aux funérailles d’un de ses proches.
  • Le député Motahari annonce qu’il a réuni le quorum de signatures pour convoquer Ahmadinedjad devant le parlement malgré les dénégations du gouvernement.
  • Un bassidj révèle le passé de Mashaï , un exécuteur des basses œuvres.
  • 80% des employés du bâtiment seraient des étrangers.
  • Session du parlement à huis clos pour traiter des relations houleuses avec le conseil des gardiens et le gouvernement.
  • Sara Shariati, Nasser Fokouhi, et Youssef Abazari interdits d’entrée à la journée de la philosophie.
Nouvelles en vrac
  • Le heurtoir d’or de la mosquée de l’Imam d’Ispahan a été volé.
  • 4 morts et 2 blessés après une explosion à Sanandadj.
  • Le journal pour enfants Chelcheragh interdit après avoir publié une interview de Shajarian.
  • Exposition d’art contemporain iranien à la galerie Brigitte Schenk de Cologne.
  • Une voiture appartenant à une personne de la campagne de Moussavi dans le Khorassan incendiée.
  • Entre lundi et mardi 170 interventions d’urgence sur des asthmatiques à Téhéran.
  • Tabriz est également polluée.
Des nouvelles de Nasrine Sotoudeh
  • 2ème audience du procès prévue le 24 novembre. Audience reportée à cause de la fermeture des administrations mercredi sous prétexte de pollution.
  • Le Haut Commissaire aux Droits Humains de l’ONU appelle à la libération de Nasrin mardi.
Sur le blog cette semaine

vendredi 26 novembre 2010

Lettre ouverte du défenseur des droits humains, l’avocat Mohammad Mostafaï au guide suprême iranien Ali Khamenei

A son excellence l’ayatollah Khamenei, dirigeant de la république islamique d’Iran, salutations.

C’est la première fois que je vous écris, ce sera aussi la dernière. Je m’adresse à vous car je pense que vous n’avez pas les qualités nécessaires pour diriger un pays et un système démocratiques. Vous savez très bien que vous avez pris le gouvernail du pouvoir par la tromperie, le mensonge, l’hypocrisie et la duplicité et obtenu le titre d’ayatollah par recommandation et opportunisme et êtes devenu le dirigeant de l’Iran sans le mériter après la mort de l’imam Khomeiny. En tout cas, le destin vous a amené à diriger un pays qui compte une diaspora de huit millions d’âmes qui ne peuvent revenir dans leur patrie à cause de votre incompétence et de la mise en place d’un système dictatorial et non démocratique. J’espère que vous lirez cette lettre écrite par un enfant de ce pays, ou à tout le moins que l’on vous la fera passer après que vos « agents anonymes » l’aient lue.

Mr. Khamenei,

J’avais sept ans que j’ai mis les pieds dans une société dont le début était marqué du sceau de la loi de Khomeiny, de gens comme vous et votre puissante bande. J’ai commencé à travailler à sept ans à cause de la pauvreté. Mes parents également travaillaient dur. Je devais frapper à toutes les portes pour pouvoir m’acheter des vêtements chauds pour l’hiver. Je n’oublierai jamais l’époque où je frappais à toutes les portes de Téhéran pour gagner une misère et demander de l’aide à toutes les personnes correctes ou pas. Je n’oublierai jamais les gifles que j’ai reçues et ai du subir pour un morceau de pain. Je n’oublierai jamais l’époque où je devais travailler et souffrir avec mes parents jusqu’à 2 heures du matin. Je n’oublierai jamais les ampoules sur mes mains gonflées dues à un travail dangereux et nocif. Je remplissais un four à céramique. Je n’oublierai jamais comment je devais ravaler mes paroles et souffrir en silence quand j’étais battu et giflé par mon instituteur pour n’avoir pas fait mes devoirs alors que je n’avais pas le temps d’étudier.
Je n’oublierai jamais que dans mon enfance, j’enviais ceux qui avaient un vélo. Je n’oublierai jamais la tristesse de ne pas pouvoir jouer avec des enfants de mon âge et les heures que j’ai passées à pleurer. Je n’oublierai jamais toute la douleur et les souffrances que ma mère a endurées pendant tant d’années.
Ce sont ces souffrances et ces tragédies que ma mère et moi avons vécues qui m’ont fait prendre la décision de changer le cours de ma vie. J’ai décidé d’étudier le droit après le service militaire. Tandis que vous vous remplissiez les poches des revenus du pétrole et d’autres industries, des gens comme moi étaient privés de leurs droits sociaux. Comme je devais travailler pendant mon enfance, j’ai été l’un des plus mauvais élève de l’école primaire au baccalauréat. Après avoir travaillé dur, jour et nuit, j’ai fini par passer le concours d’entrée à la faculté de droit et de sciences humaines de l’université de Téhéran. A la fin, après des années d’études, j’ai pu devenir avocat, un avocat qui s’est juré d’être le défenseur du faible et de l’opprimé.

Mr. Khamenei,

Je vous ai résumé ma vie pour que vous ne pensiez pas qu’il me fut facile d’arriver à faire ce travail que j’aime tant. Durant 30 ans, j’ai souffert sous votre règle et celui d’autres incompétents de votre espèce. J’ai travaillé dur pour me bâtir un statut social correct. Je suis fier d’être le défenseur de ceux dont on a violé les droits et j’ai travaillé sans relâche pour qu’ils les recouvrent. La plupart de ceux qui sont venus me voir avaient vu leurs droits violés par des juges en accord avec un système judiciaire violent et sauvage, des juges qui ne savent qu’être violents et imposer des sanctions inhumaines comme la lapidation, l’exécution capitale, les longues peines de prison, etc…

Mr. Khamenei,

Enfant, j’ai été témoin de mes propres souffrances, douleurs et misère ; avocat, j’ai porté témoignage de la souffrance et des sanglots de ceux qui pénétraient dans mon bureau. Chaque jour, une mère en pleurs venait me demander de l’aide ou un père me suppliait de sauver la vie de son enfant. Comme j’avais ressenti la douleur et la souffrance, je ressentais aussi leur douleur émanant de l’injustice et de l’oppression que vous et vos agents avaient exercées sur eux.

Mr. Khamenei,

J’ai fait des compromis dans ma vie personnelle et familiale alors que je travaillais comme avocat. Je ne voyais pas ma fille pour sauver la vie de ceux qui étaient emprisonnés par vos coquins de copains. Mon épouse, par respect pour mes idéaux, a tout toléré. Grâce à Dieu, j’ai pu sauver de vie de 50 personnes et faire libérer de nombreux innocents emprisonnés.

Mr. Khamenei,

Durant ces sept dernières années, à chaque fois que j’apprenais que les droits d’une personne étaient violés, je la représentais. Je voyageais dans tout le pays, d’une prison à l’autre pour demander justice pour une victime. Je criais que les enfants de moins de 18 ans ne devaient pas être exécutés, je criais que la lapidation était un acte barbare, que les amputations des mains et des jambes, la flagellation, les arrestations arbitraires et la détention illégale étaient néfastes à la soi-disant république islamique. Je frappais à toutes les portes pour sauver la vie des enfants. J’utilisais mon propre argent et celui des contributions d’Iraniens et d’étrangers généreux et de bonne volonté pour payer le prix du sang « dyeh » afin de sauver la vie de ceux qui ne méritaient pas d’être exécutés, pour faire libérer des gens emprisonnés arbitrairement pendant des années.
Je n’oublierai jamais Fatemeh, femme Afghane qui était en prison depuis deux ans. Si je n’avais pas pris son cas en mains, elle serait restée en prison et aurait peut-être été exécutée. Je n’oublierai jamais comment j’ai fait libéré d’un prisonnier transexuel qui était à l’isolement depuis des semaines et était violé quotidiennement par les gardes. Je n’oublierai jamais la femme dont le visage avait été aspergé d’acide par son mari cruel. Il n’y avait personne pour l’aider mais j’ai pu lui procurer des soins médicaux et un certain bien être. Je n’oublierai pas Hedieh, 14 ans, emprisonnée à Evine accusée de « relations illicites ». Elle a fini par être exilée à la prison de Radjaï-Shahr et détenue parmi des criminelles endurcies et a fini assassinée par une codétenue. Je n’oublierai pas Rahim ce jeune habitant de Tabriz ; son épouse avait plu aux agents de votre gouvernement ; il l’avait donc injustement condamné à l’exécution et son épouse à la lapidation. Je n’oublierai jamais mes plaidoiries pour Behnoud Shodjaï, emprisonné depuis l’âge de 17 ans et que vos bourreaux ont exécuté devant mes yeux. Je n’oublierai jamais les souvenirs tristes de mes clients torturés par la police et les fonctionnaires du renseignement.

Mr. Khamenei,

J’ai accepté les dossiers de centaines de personnes qui demandaient de l’aide après que leurs droits aient été violés par vos institutions sécuritaires et judiciaires avec votre permission et celle de vos copains comme Djanati, les frères Laridjani et Ahmadinedjad.

En raison de mon opposition à la lapidation, j’ai accepté tous les dossiers de lapidation qui m’étaient présentés. Je trouvais important qu’une personne sans défense condamnée à la lapidation par les bouchers de la justice assoiffés de son sang soit défendue. Mais où êtes-vous Mr. Khamenei pour voir les crimes et les atrocités commis dans l’institution judiciaire et les prisons de la république islamique, en particulier dans le bloc de sécurité « Guantanamo » 209 d’Evine ? Nous savons tous les deux très bien que vous êtes le principal coupable de tous ces crimes. C’est vous qui avez fermé les yeux en donnant n’importe quel ordre pour protéger votre pouvoir.

Mr. Khamenei,

Je n’ai pas cédé aux menaces des systèmes judiciaire et sécuritaire, et peu m’importait les interrogatoires répétés. Je savais que j’aurais des problèmes. L’année dernière, j’ai accepté le dossier de Sakineh Mohammadi, emprisonnée à Tabriz pour adultère, alors qu’elle était innocente. La nouvelle de son emprisonnement m’a été donnée par une autre cliente elle aussi emprisonnée à Tabriz. On préparait déjà son exécution et tous mes efforts n’aboutissaient à rien, toutes les portes se fermaient. Je n’avais d’autre choix que d’informer les journalistes en Iran comme à l’extérieur pour que les autorités de la république islamique qui refusaient d’écouter mes plaidoiries pour ma cliente innocente finissent par entendre sa voix.

Une fois la nouvelle répandue, beaucoup de politiciens ont exprimé leur soutien, cependant, je n’ai jamais voulu instrumentaliser un dossier. Ce dossier s’est transformé en sujet international sensible.

J’ai été convoqué et interrogé quatre heures au tribunal. Ce jour-là, je ne pensais pas être libéré, mais, grâce à Dieu, le magistrat de la deuxième chambre du tribunal d’Evine m’a laissé partir. Plusieurs heures plus tard, je me suis rendu au bureau et j’ai vu que les agents de la sécurité avaient envahi mon bureau mais étaient partis quand ils ont compris que je n’y étais pas. Néanmoins, de nombreux agents m’attendaient à l’extérieur en embuscade. Apparemment, ils étaient aveugles et ne m’ont pas vu renter dans mon bureau. Quelques heures plus tard, j’ai découvert qu’ils avaient pris mon épouse en otage ; ils ont déclaré que jusqu’à ce que je me présente, elle ne serait pas libérée. C’est pourquoi j’ai décidé de ne pas céder aux requêtes illégales des autorités juridiques sécuritaires. Quelques jours plus tard, je n’avais d’autre choix que de quitter l’Iran et c’est ainsi que mon épouse a été libérée de vos agents de sécurité. J’ai quitté l’Iran par la frontière avec la Turquie et me suis présenté à la police turque. La nouvelle de ma détention a été publiée dans un journal turc. Une équipe de fonctionnaires du renseignement et des affaires étrangères s’est rendue en Turquie pour négocier mon extradition vers l’Iran. Néanmoins, le soutien des gouvernements américain et européens m’a empêché de tomber dans les mains de vos agents.

Mr. Khamenei,

Vos « soldats croisés » étaient furieux et piqués au vif de n’avoir pas pu me mettre la main dessus et m’arrêter même après avoir pris mon épouse en otage. Ils n’ont pas pu m’arrêter et me faire avouer sous la torture comme ils l’ont fait avec Sadjad Ghaderzadeh, le fils de Sakineh et Houtan Kian, l’autre avocat de Sakineh et utiliser ces aveux aux fins de propagande. Je n’ai pas été attrapé par vos soldats et j’en profite pour faire entendre les voix des femmes et des enfants opprimés en prison et je fais savoir au monde les crimes que vous avez commis contre l’humanité.

Mr. Khamenei,

Même si j’étais tombé entre les mains de vos agents, je n’aurais pas eu peur. Mon sang n’est pas plus rouge que celui des milliers de prisonniers arbitrairement et sommairement exécutés dans les années 80 et 90. Mon sang n’est pas plus rouge que celui de nombreux adolescents, jeunes, hommes et femmes attaqués et tués par vos sbires dans les rues de Téhéran. Je ne suis pas différent des prisonniers politiques privés de leur droit à recevoir la visite de leur famille et de leurs enfants. Mon sang n’est pas plus rouge que celui de Sohrab, de Neda ou des tués du centre de détention de Kahrizak.

Mr. Khamenei,

Puisque vos sbires n’ont pas réussi à m’arrêter, ils tentent de détruire ma personnalité. Un jour ils me traitent d’usurpateur, le lendemain d’avocat en fuite. Le lundi, à 20h30 à la télévision ils me traitent de « mercenaire de l’occident » et m’accusent de liens avec le Parti Communiste des Travailleurs. En même temps, ils continuent de me demander par différents canaux, y compris l’ambassade d’Iran en Norvège, de rentrer en Iran pour mener à bien leurs mauvais plans.

Mr. Khamenei,

J’ai répété à de multiples reprises que je n’étais lié à aucun groupe, je suis un avocat indépendant. Et même si je travaillais avec un groupe, ce ne serait pas un crime. Tous ceux qui vivent hors d’Iran, qu’ils soient communistes, membres de l’OMPI, sympathisants du Toudeh, etc… sont les victimes des crimes que vous et les vôtres avez commis. Ils essaient de récupérer leurs droits. Heureusement, la plupart d’entre eux sont des défenseurs des droits humains tandis que vous les violez.
Mr. Khamenei,

Je suis convaincu que vous n’arriverez à rien par la torture, la force, l’emprisonnement et la contrainte, par la répression de ceux qui s’opposent à votre politique erronée pas plus qu’en diffusant à la télévision des programmes faux et trompeurs ; je vous conseillerais plutôt de cesser de commettre des crimes au nom de l’islam. Arrêtez l’esclavage des femmes, arrêtez de les discriminer, arrêtez les exécutions, les lapidations et les prises d’otages au nom de l’islam. Au lieu d’extorquer des aveux sous la torture, abolissez plutôt les châtiments inhumains. Et je vous le redis, vous et vos agents, anonymes ou pas, ne méritez de toute façon pas de diriger ni de gouverner.

Source : http://persian2english.com/?p=16609

lundi 22 novembre 2010

Discours de remerciement de la mère de Kouhyar Goudarzi

Kouhyar Goudarzi

Lauréat du Prix de la Liberté du club national américain de la presse, honoré en son absence
Mesdames et Messieurs,

Je vous salue et vous remercie d’avoir décerné le Prix de la Liberté du Club National de la Presse à mon fils, Kouhyar Goudarzi. Je voudrais que vous sachiez que recevoir le prix John Aubuchon est un grand honneur pour moi et un encouragement pour toutes les mères de prisonniers politiques iraniens [ voir la vidéo de la remise du prix].  Il est réconfortant de savoir que les « charges » retenues contre nos enfants dans leur propre pays, pour lesquelles ils sont emprisonnés, comme travailler pour les droits humains, lutter pour le droit à l’éducation supérieure, liberté de discours, liberté de la presse, droits des enfants travailleurs, campagne contre la peine de mort, droits civils et civiques, etc… ne sont pas des « charges » mais provoquent l’encouragement et même les applaudissements dans d’autres pays. Au nom de Kouhyar et en mon nom propre, je dédie ce prix à la nation iranienne, verte et grande, aux folles de la place de Mai argentines, aux mère palestiniennes, aux mère d’Iran, si patientes, surtout à la mère de Neda Agha-Soltan, à la mère de Sohrab Aarabi, à la mère de Mohsen Rouholamini, à la mère de Kianoush Assa et à toutes les mères de prisonniers politiques d’Iran, dont l’esprit a su rester libre.

Je suis certaine que le noble et vert peuple d’Iran, grâce à sa persévérance et à son endurance, accèdera à ses exigences légitimes et que ce jour viendra. J’aurais souhaité recevoir ce prix pour Kouhyar en personne, cela n’a malheureusement pas été possible en raison des délais. Comme mon fils est toujours en prison, je souhaite qu’il puisse le recevoir lui-même.

Je salue toutes les personnes libres du monde avec beaucoup de respect et de gratitude

Parvin Mokhtare
Mère de Kouhyar Goudarzi

Source: http://www.iranian.com/main/2010/nov/kouhyar-goudarzi

Justice pour l’Iran, tout de suite ! - Shadi Sadr

Tout d’abord, je voudrais remercier Katharin et George Alexander d’avoir créé le prix du droit pour reconnaitre les mérites des avocats des droits humains dans le monde entier, eux qui ne reçoivent habituellement ni appréciation ni reconnaissance mais oppression et répression. Je suis très honorée que le comité du prix du droit Katharin et George Alexander m’ait trouvée digne de ce prix et je suis reconnaissante d’être parmi vous ce soir. Je remercie spécialement la Professeur Cynthia Mertins de tout ce qu’elle a fait ; sans elle je ne serais pas présente à cette cérémonie, en train de vous parler ce soir. Avant de commencer mon discours, Je voudrais dédier l’honneur du prix Katharin et George Alexander de cette année à deux militantes qui ont sacrifié leurs vies pour la liberté et la démocratie : Nasrine Sotoudeh, une avocate des droits humains de premier plan et Nazanine Khosravani, une journaliste courageuse, militante des droits civiques. Elles sont maintenant toutes les deux derrière les barreaux, subissent des pressions énormes, privées de leurs droits fondamentaux. Je voudrais vous demander une minute de silence pour leur souhaiter liberté et paix.

Je vais être honnête ; le choix du sujet de mon discours de ce soir a été à la fois facile et difficile. Facile, car je savais que je parlerais à un public bien informé des violations des droits humains en Iran. Difficile parce que je ne savais pas ce qui vous viendrait à l’esprit quand je dirais : « violations des droits humains en Iran ». Serait-ce l’écrasement violent des manifestants après les élections de 2009 ou bien la torture et les et les violations du droit des prisonniers ? Vous rappelleriez-vous des exécutions par lapidation ou bien des discriminations légales appliquées contre les femmes ? Et qu’en serait-il des détails ? Combien de noms vous viendraient à l’esprit ? Combien de visages gravés dans votre mémoire ? Combien de victimes ? Combien de contrevenants aux droits humains ? Vous souvenez-vous de certains noms ou n’avez- vous qu’une image générale, quelque part dans le monde, oui, ça existe sur une carte, c’est quelquefois difficile à trouver, les droits humains sont violés en général et nous nous opposons à la violation des droits humains en général.

En fait, de quoi parle-t-on lorsque l’on parle de violations des droits humains en Iran ?...On parle d’une longue liste d’exemples de violations des droits humains en Iran, systématiques et généralisés, dont le nombre ne fait que croître dans tous les domaines, des droits des femmes aux droits des minorités ethniques, des droits des enfants aux droits de minorités religieuses, de la liberté d’expression et d’association aux droits des homosexuels. Je ne souhaite de toute façon, pas aujourd’hui parler de cette longue liste générale. Je voudrais plutôt vous expliquer ce que les violations des droits humains en Iran signifient pour moi. Aujourd’hui, je voudrais faire émerger ces détails qui ne viennent pas spontanément à l’esprit, des noms, des visages, des gens.

Quand j’ai commencé à travailler avec des femmes condamnées à la lapidation, j’étais très bien informée des lois qui leur étaient applicables de par mes qualifications d’avocate. De par mes qualifications de journaliste, j’avais lu beaucoup d’articles dans les journaux sur elles, des informations sur une femme condamnée pour une liaison extraconjugale ou sur une autre qui avait tué l’homme qui tentait de la violer et ainsi de suite. Même comme ça, ces lois n’étaient qu’un amalgame de mots bruts dans les livres de droit et ces femmes se réduisaient à quelques phrases dans un journal du matin. Quand j’ai rencontré ces femmes en prison, que j’ai accepté de les représenter en tant qu’avocate, quand j’ai lu leurs dossiers épais, que je leur ai serré la main, que je les ai embrassé, quand j’ai vu la peur de la mort leur emplir les yeux et leurs enfants verser les larmes amères des séparations, je leur ai donné de l’espoir, les ai rendues optimistes ; et pourtant, mon propre cœur était las et je désespérais de pouvoir faire vraiment quelque chose pour elles. Ces femmes sont sorties des dossiers légaux et des journaux pour entrer dans ma vie. Leurs noms et leurs visages font partie intégrante de mes rêves récurrents.

C’est ainsi et par la « Campagne pour Arrêter la Lapidation pour Toujours » que mes collègues et moi avons pu sauver ces femmes des archives poussiéreuses de leurs dossiers et des journaux et raconter leurs histoires. Elles sont devenues des noms et ont retrouvé leurs visages. Elles ont attiré l’attention en tant qu’êtres humains et non plus en tant que simples statistiques dans les discours sur les droits humains. C’est certainement la principale raison qui leur a permis d’échapper à l’exécution et à la lapidation et qui a poussé la communauté internationale à exercer tant de pression sur le gouvernement iranien qu’il a dû amender son code pénal, bien que ces amendements n’aient pas encore acquis force de loi. Publier des histoires vraies, donner des noms et des identités à chaque partie de ce qui n’était auparavant qu’une masse informe de victimes de la lapidation, a vraiment rendu à la société sa soif d’obtenir justice pour ces noms. Nos histoires sur la vie de ces femmes, les discriminations légales dont elles ont souffert, leur pauvreté et leur illettrisme ont non seulement souligné leur passé mais aussi leur futur et celui de toutes ces femmes sans nom et sans visage qui leur ressemblaient. Nous avons donné à ces femmes un nom et un visage, après quoi beaucoup d’entre elles ont pu être libérées. Ce n’était peut-être pas une vraie justice après tant d’années passées en prison, luttant contre le cauchemar de la lapidation jour et nuit, mais nous avons réussi à ralentir le processus de mise en place de la lapidation pour les femmes.

Avec ce que j’ai appris de cette expérience, je me penche actuellement sur les exemples de torture sexuelle dans les prisons iraniennes durant ces 30 dernières années. Beaucoup d’amis me demandent « Les femmes iraniennes ont actuellement des tonnes de problèmes vitaux et essentiels, pourquoi dépenser ton temps et ton énergie sur un sujet dont tout le monde, y compris les membres de la famille des victimes, tentent tant d’oublier ? » C’est vrai, pourquoi dépenser tant de temps et d’énergie pour faire des recherches sur le passé alors qu’actuellement les violations des droits humains ont lieu en Iran, de façon systématique généralisée ?

J’ai été arrêtée en juin 2009 alors que je me rendais à une manifestation post-électorale. Pendant mon premier interrogatoire en prison, les yeux bandés, face au mur, celui qui m’interrogeait sur des sujets politiques et mes activités pour le mouvement des droits des femmes m’a soudain posé une question très personnelle sur mes relations matrimoniales. Je lui ai demandé ce que cette question avait à voir avec mon dossier. Il m’a fermement répété la question, exigeant une réponse. La douleur qu’il m’a infligée, lui l’autorité suprême, en pénétrant dans l’intimité de ma vie à moi, une prisonnière dénuée de tout pouvoir, était pour moi une expérience nouvelle. Après l’interrogatoire, j’ai passé des heures dans ma cellule d’isolement à penser à cette question. Je pensais que si le fait qu’il ait pénétré dans ma vie privée par le biais d’une question me causait tant de douleur, alors qu’en était-il de la douleur subie par ces prisonniers soumis à la torture sexuelle et au viol pendant toutes ces années ? Néanmoins, mon expérience personnelle ne suffit pas à justifier mon intérêt actuel pour la torture sexuelle en prison. Pour le justifier, je dois remonter le temps, repartir du début, quand les islamistes ont pris le pouvoir en Iran, au début de la république islamique d’Iran.

Il y a peu de documents disponibles sur la torture sexuelle et le harcèlement en prison pendant la première décennie qui a suivi la prise de pouvoir des islamistes en Iran. A ce jour, personne ne connaît exactement le nombre de prisonniers exécutés uniquement pour leurs idées politiques entre 1981 et 1988. Il n’existe pas de statistiques exactes sur les massacres en prison en 1988. J’ai promis de ne pas parler aujourd’hui de statistiques et de nombres mais de spécificités, de personnes et de visages. Je veux parler de trois cas qui posent des questions dérangeantes.

Le premier nom, le premier visage est celui de Niloufar Tashayyod, lycéenne de 15 ans. Elle a été arrêtée au lycée pour avoir participé à une manifestation anti-gouvernementale et y avoir distribué des tracts d’une organisation de gauche dont elle était sympathisante. Elle a été condamnée à mort. L’organisation dont elle était sympathisante condamnait la lutte armée et soutenait la lutte politique. Elle a été jugée sans avocat lors d’un procès qui a duré moins de 5 minutes et a été exécutée dans les 3 mois qui ont suivi son procès, sans pouvoir voir sa famille une dernière fois. Des années plus tard, une de ses codétenues a écrit : « J’étais allongée près de Niloufar ; elle m’a pris la main et m’a dit : « J’ai peur de mourir. » Je l’ai regardée sans savoir que dire. Mon cœur tremblait. Comme elle, je n’avais aucune expérience sur le sujet. J’ai pris sa tête dans mes mains et je lui ai dit tout doucement pour ne pas réveiller nos codétenues : « Chère Niloufar, qui a dit que tu allais mourir ? » Elle m’a serré très fort dans ses bras comme une enfant abandonnée et m’a dit : « Ils ne me laisseront pas sortir d’ici. » Puis elle a commencé à pleurer doucement. » Elle a été fusillée par un peloton d’exécution en septembre 1981.

Les membres des familles des jeunes filles vierges exécutées dans les années 80 pour leurs activités politiques ont attesté devant des enquêteurs internationaux que les jeunes filles étaient violées avant leur exécution. Ils pensent que, suite à la croyance religieuse disant qu’une vierge exécutée allait au paradis, les autorités de la république islamique d’Iran mariaient puis violaient les jeunes filles dans la nuit précédant leur exécution pour empêcher leurs opposantes d’aller au paradis. Pour moi qui fais des recherches sur le sujet plus de 30 ans plus tard, le viol violent de jeunes prisonnières vierges avant leur exécution n’est pas qu’une affirmation qui aurait perdu de son impact à cause d’un usage excessif. Aujourd’hui, ma question précise est : Niloufar Tashayyod, à peine 15 ans quand elle a été exécutée, a-t-elle été violée avant que d’être exécutée ?

Le deuxième nom, le deuxième visage est celui de Zahra Kazémi, reporter photo arrêtée le 23 juin 2003 alors qu’elle photographiait un rassemblement de membres des familles des prisonniers politiques devant la prison d’Evine à Téhéran. Son corps sans vie a été rendu à sa famille 18 jours plus tard. Les autorités gouvernementales ont annoncé que sa mort était due à « un objet contondant ayant heurté sa tête ». La seule personne incriminée dans ce dossier a été acquittée plus tard. Néanmoins, le médecin du ministère iranien de la défense, qui travaillait dans un hôpital militaire où elle avait été transférée, a quitté l’Iran en 2004 et a demandé asile au Canada. Il prétend qu’après avoir examiné le corps de Zahra Kazémi 4 jours après son arrestation, il a relevé des traces de bastonnade sévère, de torture et de viol. Elle a ensuite souffert d’une hémorragie cérébrale due à l’impact d’un objet alors qu’elle tentait de résister et est morte à l’hôpital. Aujourd’hui ma question précise est, par qui et comment Zahra Kazémi a-t-elle été torturée sexuellement et violée ?

Le troisième et dernier nom, le troisième et dernier visage dont je souhaite parler aujourd’hui est celui de Taraneh Moussavi. Comme les deux autres, elle pose aussi une question obsédante dont l’existence même est niée par les autorités iraniennes. On dit qu’elle a été arrêtée lors d’une manifestation post-électorale en 2009. Un temoin oculaire a déclaré : « La police anti-émeutes nous a mis dans des fourgons et nous a emmenés dans des centres de détention du nord de Téhéran où nous avons été torturées physiquement et psychologiquement. Taraneh était parmi nous. Elle était belle de visage et de corps et bien habillée. C’est son interrogatoire qui a duré le plus longtemps. Elle avait les yeux verts. Cette nuit-là, j’ai été libérée avec un groupe d’autres détenus. Avant notre libération, on a envoyé un autre groupe en d’autres lieux. Mais les forces en civil ont gardé Taraneh et ne lui ont même pas permis de contacter sa mère.

Pendant trois semaines, sa famille n’a eu aucune nouvelle, puis un inconnu a appelé la mère de Taraneh au téléphone pour lui dire que sa fille était hospitalisée pour un accident de voiture qui lui avait causé un déchirement de l’utérus et du rectum. Le corps sans vie de Taraneh a fini par être rendu à la famille ; en raison des menaces des services de sécurité, la famille de Taraneh n’a pas encore fait connaître sa version des faits.

Aujourd’hui ma question est : que faut-il faire pour que la famille de Taraneh puisse donner sa version et exprimer à haute voix son histoire pleine de chagrin ?

A mon avis, nous devons savoir aujourd’hui ce qui est exactement arrivé à Niloufar, Zahra et Taraneh durant les dernières heures de leurs vies. Quels ont été les responsables de leur harcèlement et de leur mort ? Qu’est-ce que leurs familles et leurs amis ont enduré au milieu de tant de peur, de chagrin et d’humiliation ? Non seulement les Iraniens, mais le monde entier doit entendre ces histoires tellement dignes être dites et répétées, qui méritent tellement être entendues, non seulement parce qu’elles ouvrent une fenêtre sur un chapitre tu de la souffrance humaine, mais encore et surtout pour qu’elles ne se reproduisent plus jamais.

Ma génération, une génération qui est venue au monde, est allée à l’école et à l’université sous la république islamique, a peu d’information sur les violations généralisées des droits des prisonniers dans les années 1980. Il y a même pire ; la censure complète et absolue des nouvelles et des informations sur cette période a fait que ma génération a fini par croire l’histoire officielle, en gros que les personnes exécutées dans les prisons étaient des terroristes qui avaient tué des innocents dans la rue. C’est pourquoi, même ceux qui possèdent un minimum d’information sur ce qui c’est passé pendant ces années noires ont peine à sympathiser avec les victimes et leurs familles. Nous avons assimilé la propagande du gouvernement et cru que des gens comme Niloufar Tashayyod étaient des terroristes qui avaient posé des bombes et méritaient donc être torturés et exécutés Jusqu'à juin dernier, nous croyions qu’un écrasement de l’opposition par le gouvernement tel que celui des années 1980 ne se répéterait jamais. Mais ce qui c’est passé pendant l’écrasement des manifestations post-électorales nous a clairement démontré que ce que nous pensions était erroné. Les violations des droits humains se sont tellement généralisées qu’elles ne pouvaient être comparées qu’aux événements de la première décennie post-révolutionnaire. Bien que ces évènements, le tabassage, l’emprisonnement et même le meurtre des manifestants dans la rue aient rendus la jeune génération plus réceptive aux violations des droits humains en Iran, notre histoire n’a pas rencontré la leur. Nos peines et nos souffrances ne se sont pas liées aux nôtres comme si nous étions les nous étions les premiers à ressentir de telles maladies et si tout ce qui nous avait précédé n’était que le passé et n’avait aucune relation avec le travail que nous effectuons aujourd’hui. Au mieux, il reste des chiffres dans des livres et des histoires des générations précédentes : 3.000, 5.000, 7.000 et 20.000 personnes. Pas de noms, pas de visages. Nous avons parlé à de multiples reprises de la nécessité de faire la lumière sur les faits entourant la mort de Taraneh Moussavi, de l’urgence de juger les responsables de cette grave injustice et du droit de sa famille et de ses amis de raconter leur propre histoire, de faire leur deuil et d’exiger le châtiment des acteurs et des instigateurs de tout ça. Et pourtant, nous n’avons jamais parlé de Niloufar Tashayyod et des autres femmes dans son cas. Alors que, si l’histoire exacte de la vie de Niloufar Tashayyod avait été publiée, ceux qui violent les droits humains n’auraient pas été impunis et ne n’auraient pas pu continuer leurs menées et attaquer sexuellement Zahra Kazémi durant son interrogatoire et la tuer. Peut-être que, si les acteurs et les instigateurs de la mort de Zahra Kazémi avaient été présentés au public et jugés équitablement, il n’y aurait plus de forces de sécurité pour oser isoler Taraneh Moussavi de la foule pour la conduire à la mort. Nous avons davantage de sympathie pour les nouveaux noms, les nouveaux visages. Nous avons plus de sympathie pour Taraneh Moussavi que pour Zahra Kazémi, et plus pour Zahra Kazémi que pour Niloufar Tashayyod. Malheureusement, le reste du monde aussi connaît mieux et a plus de sympathie pour les nouveaux noms que pour les anciens.

Historiquement parlant, Taraneh Moussavi représente la suite de Zahra Kazémi qui elle-même suivait Niloufar Tashayyod. Mais en Iran, nous sommes face à des expériences historiques fragmentées. Voilà plus d’un siècle que nous combattons pour la démocratie et la liberté, mais nous sommes restés sur la ligne de départ sur beaucoup de fronts. L’année dernière, nous avons été témoins de la manière dont le gouvernement a traité de façon injuste et inéquitable beaucoup qui, comme moi, ont participé aux manifestations post-électorales pacifiques, les accusant de Moharebeh, ce qui signifie prendre les armes contre le gouvernement et est passible de la peine capitale. Nous sommes cependant incapables de relier cette distorsion systématique des faits par le système judiciaire iranien à ce qui a filtré du passé. Nous n’avons pas pu totalement envisager que, si le viol et la torture sexuelle ont été commis en Iran après les élections, ce n’était pas nouveau ni sans précédent. Ce fait, bien qu’ordinaire, n’avait jamais été relaté, les faits l’entourant jamais éclairés et les acteurs et participants jamais punis justement, et donc cela c’est reproduit. Dans l’esprit du public, tous les prisonniers exécutés après les élections ont été victimes de violations des droits humains. Nous leur avons rendu le respect qui leur est dû ainsi qu’à tous ceux qui ont été accusés sans fondements et pourtant, nous n’avons pas étendu ce respect aux victimes des violations des droits humains de notre histoire passée. Il semble que la génération précédente n’ait pas réussi à raconter son histoire et à la transférer à notre génération qui, à son tour, sous le joug d’une lourde censure, n’a pas eu de contact avec les rapports validés de cette époque. Il est donc maintenant temps, une fois pour toute, de relier toutes ces histoires et d’en faire une histoire uniforme ou à tout le moins uniformément acceptable. Si nous ne le faisons pas, je crains que la génération de ma fille, la troisième depuis la révolution, ne se souvienne plus de Taraneh Moussavi parce que justice n’aura pas été faite sur son cas, de la même façon dont nous ne nous souvenons plus de Niloufar Tashayyod et des milliers d’autres dans son cas pour lesquelles nous ne demandons pas justice. Pire, aujourd’hui où nos blessures saignent encore, si nous n’honorons pas les blessures anciennes des autres, alors la prochaine génération agira de même et ne respectera pas nos blessures qui vieilliront avec l’âge. La recherche de la justice, sans séparation artificielle d’espace temps, sans diviser l’histoire et lui donner de priorité, est le devoir historique de ma génération.

Maintenant, vous vous demandez quel peut bien être le rapport entre la longue histoire de ma génération, son lien avec le passé et vous citoyens américaines qui n’avez pas la même histoire et les mêmes problèmes.

Dans ce monde global, nous savons tous que, dans bien des cas, le courage individuel a changé le cours de l’histoire. L’histoire ne peut nier le rôle d’instrument que le courage de Rosa Parks a joué dans le Mouvement des Droits Civiques Américain. Aujourd’hui sur le champ de bataille des droits des citoyens, il nous faut tirer des leçons des expériences individuelles et collectives des autres pour obtenir les droits humains. En même temps, nous avons besoin du courage individuel et de l’ingéniosité de chacun d’entre vous ; cela a une importance capitale pour être efficace au niveau mondial. Je considère que le prix Katharin et George Alexander pour le droit que vous m’avez décerné est une mesure de longue haleine qui aidera à rendre possible la narration de l’histoire individuelle de tous les Iraniens qui se sont battus et se battent encore pour atteindre l’égalité et la liberté.

En ce moment, tout le monde parle de « Démocratie en Iran », « Démocratie pour l’Iran » et « Démocratie sur l’Iran ». Il y a d’énormes différences de sens entre ces « conjonctions et prépositions », mais pour moi il est clair que, sans justice, et je veux dire justice tout de suite, il n’y aura pas de démocratie en Iran. Le travail de la société civile iranienne est bien sûr important, mais la communauté internationale peut largement aider par exemple en mettant en place des programmes d’éducation pour transférer les connaissances d’expériences similaires dans d’autres pays, soutenir les recherches et la documentation des violations des droits humains, aider à préparer les listes noires des noms de ceux qui ont participé aux violations des droits humains généralisées, et soutenir les efforts pour convaincre les gouvernements et les Nations Unies de la nécessité de prendre des mesures efficaces contre ceux qui les perpètrent. Chacun de ceux qui sont d’accord avec moi devrait commencer à réfléchir tout de suite sur la façon de donner une meilleure place aux noms et aux visages des Niloufars, des Zahras et des Taranehs chaque jour et ainsi de rendre le monde dans lequel nous vivons moins sûr pour les violeurs.

Dans l’espoir que la justice triomphe en Iran, avec tous mes remerciements.

Source : http://www.asre-nou.net/php/view.php?objnr=12134