jeudi 16 juillet 2009

Meurtres dans les dortoirs : des étudiants témoignent


Saeed Kamali Dehghan rapporte dans le Guardian daté du 12 Juillet de nouveaux détails sur les crimes commis lors de l'attaque des dortoirs de l'Université de Téhéran dans la nuit du dimanche 14 au lundi 15 juin. Un vidéo est également disponible ici.

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"Ils sont venus à une heure tardive où les étudiants s’apprêtaient à dormir". A l’extérieur, Téhéran était toujours en ébullition 2 jours après l’élection volée. A l’intérieur des dortoirs situés avenue Amirabad, les étudiants sur les nerfs essayaient tant bien que mal de dormir. Juste quelques heures plus tôt, certains d’entre eux avaient été battus en face de la porte d’entrée principale de l’Université de Téhéran.

La police a soudainement cassé les serrures, s’est mise à attaquer violemment plusieurs douzaines d’étudiants, à arrêter une centaine et à tuer. Cinq étudiants ont été tués lors de cette attaque. Les autorités refusent toujours d’accepter qu’une telle incursion a eu lieu par les forces de police. Mais les témoignages livrés par cinq étudiants présents sur le campus pendant les faits présentent une toute autre histoire.

"Nous nous apprêtions à aller dormir lorsque soudainement nous les avons entendus casser les serrures de nos chambres" raconte l’un des 133 étudiants arrêtés ce soir-là. "Je les avais vus plus tôt frapper des étudiants mais jamais je n’aurais imaginé qu’ils viendraient à l’intérieur des dortoirs. C’est contraire à la loi iranienne".

46 étudiants d’un dortoir ont été arrêtés et emmenés aux sous-sols du ministère de l’Intérieur sur l’avenue Fatemi. C’était aux étages supérieurs de ce même bâtiment, que le comptage des votes et le trucage des résultats avaient eu lieu. 87 autres ont été emmenés dans un bâtiment de la police située rue Hafez. Cinq sont morts : Fatemeh Barati, Kasra Sharafi, Mobina Ehterami, Kambiz Shoaee et Mohsen Imani. Ils ont été inhumés au cimetière Behesht-e-Zahra de Téhéran le jour d’après sans que leurs parents ne soient au préalable informés. Les noms des étudiants assassinés ont été confirmés par l’organisation étudiante Tahkim-e Vahdat.

Les témoins disent que les 2 femmes et 3 hommes décédés étaient violemment frappés à la tête avec des bâtons électriques. Leurs familles ont reçu des menaces pour ne pas parler au sujet de leurs enfants et de ne pas organiser de cérémonies de deuil. Tout comme les parents de Neda Agha-Soltan dont le visage est devenu le symbole du mouvement de protestation après que sa mort ait été filmée dans la rue.

D’après la loi iranienne, amendée suite au soulèvement étudiant de 1999, la police, les gardiens de la révolution et les autres milices ne sont pas autorisés à entrer dans les universités. Les protestations avaient débuté suite à l’élection du 12 Juin et ce Dimanche là, la contestation prenait de l’ampleur. "La police a fait usage de gaz lacrymogène dans les dortoirs, s’est mise à nous frapper", se rappelle un autre étudiant. "Je n’avais même pas pris part aux manifestations mais l’un d’eux s’est jeté sur moi, sur mon dos et s’est mis à me frapper. Et ensuite, en prétendant me fouiller pour trouver des armes ou des couteaux, il a abusé de moi sexuellement. Ils nous menaçaient de nous pendre et de nous violer".

Un autre décrit la scène suivante: "la police anti-émeute, positionnée en deux rangées, formait un tunnel, leur bouclier servant de toit, nous obligeant à courir sans arrêt tout en nous frappant. L’un de mes colocataires avait la jambe cassée mais ils l’obligeaient à courir encore.

D’autres rapportent des expériences similaires dans les mains des miliciens du Basij: "Un Basiji était derrière moi et me disait: je n’ai pas … quelqu’un ces sept dernières années, joli petit garçon". "Je vais te montrer ce que je peux te faire quand on reviendra. Ils nous harcelaient. Ils nous disaient que nous les avions insultés, que nous avions insulté le Guide Suprême".

"Avant d’être emmenés dans un bus, les étudiants ont été regroupés devant le dortoir avec des sacs plastiques sur leur tête, les mains attachées par des menottes en plastique, connues ici sous le nom de menottes israéliennes". "Je n’ai eu qu’une seconde pour réaliser que nous étions dans le bâtiment principal du ministère de l’Intérieur, avenue Fatemi", raconte un autre étudiant en pleurant. "Je ne pouvais pas le croire. Il y avait des politiciens, parlementaires et officiels importants aux étages supérieurs et nous étions là au sous-sol. Un détenu a été abusé par les gardes après avoir perdu le contrôle de sa vessie. Quelques heures plus tard, les gardes leur ont donné du pain et du fromage, jetés sur un sol sale, en les menaçant de les punir s’ils refusaient de manger. Un Basiji nommé Ali les a filmés avec son téléphone portable, ordonnant aux détenus de dire "je suis un âne".

Les blessures étaient ignorées. Un étudiant qui avait perdu un œil après avoir été touché par une balle en plastique n’était pas soigné. "Nous nous sommes mis à les supplier pour que qu’ils transfèrent à l’hôpital au moins ces deux qui soufraient plus que d’autres, mais ils ont répondu : "ils sont bons à mourir".

Leur arrestation a finalement pris fin 24 heures plus tard, quand le président de l’Université de Téhéran, Farhad Rahbar et Alireza Zakani, député de Téhéran, ont discuté avec les détenus. Rahbar leur a dit qu’il avait donné à la police la permission d’entrer dans les dortoirs pour contrôler la situation. Une affirmation qu’il a lui-même reniée quelques jours plus tard.

Avant leur libération, les étudiants ont été obligés de mettre des vêtements neufs fournis par la police. "Ils voulaient supprimer toutes traces et évidences de ce qui s’était passé", l’un des gardes a dit aux détenus. "Mais qu’est-ce qui peut être plus forts que les témoignages de 133 étudiants qui étaient là et qui avaient souffert ?

1 commentaire:

  1. Le Monde entier regarde la République Islamique d'Iran et ils ne semblent pas avoir honte de se comporter comme des BARBARES.

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